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Plut. in Catone, p. 776.

d'un homme étaient un titre légitime pour s'emparer de tous ses biens.

En arrivant à Rhodes, Caton fit dire à Ptolémée de se retirer paisiblement, et lui promit, s'il le faisait, de lui procurer la souveraine-sacrificature du temple de Vénus à Paphos, dont les revenus étaient assez considérables pour le faire subsister honorablement. Ptolémée rejeta cette proposition. Cependant il n'était pas en état de se défendre contre la puissance des Romains: mais il ne pouvait se résoudre, après avoir porté si long-temps la couronne, à vivre en simple particulier. Résolu donc de terminer son règne et sa vie en même temps, il s'embarqua avec toutes ses richesses et se mit en mer. Il avait dessein de faire percer son vaisseau, afin de périr ainsi avec tous ses trésors : mais quand il en fallut venir à l'exécution, quoiqu'il persistât toujours dans la résolution de périr lui-même, il n'eut pas le courage d'envelopper ses innocentes et bien-aimées richesses dans sa ruine, et fit voir par là qu'il les aimait plus qu'il ne s'aimait lui-même, roi de Cypre en titre, mais en effet vil esclave de son argent. Il revint à terre, et remit ses trésors dans leurs magasins; et après cela il s'empoisonna, et laissa tout à ses ennemis. Caton apporta ces trésors l'année suivante à Rome. La somme fut si grosse, qu'à peine, dans les plus grands triomphes, en était-il entré dans le trésor une pareille. Plutarque la fait monter à près de sept mille talents (vingt et un millions). Caton fit vendre publiquement tous les effets et les meubles précieux de

Procul dubio hic non possedit divitias, sed a divitiis possessus est; titulo rex insulæ, animo pecu

niæ miserabile mancipium.» (VAL.. MAX.)

Ptolémée, et ne s'en réserva qu'un portrait de Zénon, fondateur de la secte des stoïciens, dont il avait embrassé les sentiments.

Le peuple romain se dévoile ici et se montre, non plus tel qu'il avait été dans les beaux siècles de la république, plein de mépris pour les richesses et d'estime pour la pauvreté, mais tel qu'il était devenu depuis que l'or et l'argent étaient entrés en triomphe à Rome avec les généraux qui avaient vaincu les ennemis. Jamais rien ne fut plus capable de décrier et de diffamer les Romains que cette dernière action. » Au lieu qu'autrefois', « dit Cicéron, le peuple romain se faisait un honneur «<et presque un devoir de rétablir sur le trône, des rois << ennemis qu'il avait vaincus, et qui avaient porté les << armes contre lui: maintenant un roi, toujours allié « ou du moins toujours ami du peuple romain; qui ne <«< lui avait jamais fait aucun tort; de qui ni le sénat ni <«< aucun de nos généraux n'avaient jamais reçu aucune plainte, qui jouissait tranquillement des états que ses « pères lui avaient laissés, s'en voit dépouillé tout d'un « coup sans aucune formalité, et tous ses biens vendus

1 « Ptolemæus, rex, si nondum socius, at non hostis, pacatus, quietus, fretus imperio populi romani, regno paterno atque avito, regali otio perfruebatur. De hoc nihil cogitante, nihil suspicante, est rogatum, ut sedens, cum purpura et sceptro, et illis insignibus regiis, præconio publico subjiceretur; et imperante populo romano, qui etiam victis bello regibus regna reddere consuevit, rex amicus, nullâ injurià commemoratâ, nullis repetitis rebus, cum bonis omnibus publica

retur... Cyprius miser, qui semper socius, semper amicus fuit; de quo nulla unquam suspicio durior aut ad senatum, aut ad imperatores nostros allata est: vivus (ut aiunt) est et videns, cum victu ac vestitu suo, publicatus. En cur cæteri reges stabilem esse suam fortunam arbitrentur, quum hoc illius funesti anni perdito exemplo videant, per tribunum aliquem se fortunis spoliari (posse) et regno omni nudari. » (Ctc. Orat. pro Sextio, n. 57 et 59.)

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«< à l'encan, presque sous ses yeux, par l'ordre de ce « même peuple romain. Voilà, continue Cicéron, de quoi rassurer les autres rois, à qui ce funeste exemple << apprend qu'il ne faut parmi nous qu'une intrigue se« crète de quelque tribun séditieux pour les arracher de << leur trône, et les dépouiller en un moment de tous << leurs biens. >>

Ce qui m'étonne le plus, c'est que Caton, le plus juste et le plus homme de bien de ces temps-là, (mais qu'est-ce que la vertu et la justice des païens la plus éclatante?) ait voulu prêter son ministère et son nom à une injustice si criante. Cicéron, qui avait des raisons de le ménager, et qui n'osait blâmer ouvertement sa conduite, montre néanmoins dans la même harangue que je viens de citer, mais d'une manière fine et délicate, et en paraissant l'excuser, combien cette démarche l'avait déshonoré.

Dans le séjour que Caton fit à Rhodes, Ptolémée Au lète, roi d'Égypte, et frère de celui de Cypre, vint l'y trouver. Je réserve à un des livres suivants à exposer l'histoire de ce prince, qui mérite une attention particulière.

LIVRE VINGT-DEUXIÈME.

SUITE DE L'HISTOIRE

DES SUCCESSEURS D'ALEXANDRE.

LE

E vingt-deuxième livre est partagé en trois articles, qui, tous trois, sont des abrégés : le premier, de l'histoire des Juifs depuis le règne d'Aristobule jusqu'à celui d'Hérode-le-Grand; le second, de l'histoire des Parthes depuis l'établissement de cet empire jusqu'à la défaite de Crassus; le troisième, de l'histoire des rois de Cappadoce jusqu'à la réunion de ce royaume à l'empire

romain.

AN. M. 3898.

Jos. Autiq.

ARTICLE PREMIER.

Abrégé de l'histoire des Juifs depuis Aristobule fils d'Hyrcan, qui prit le premier la qualité a roi, jusqu'au règne d'Hérode-le-Grand, Iduméer

Comme l'histoire des Juifs est souvent liée avec cell des rois de Syrie et d'Égypte, j'ai eu soin, dans l'oc casion, d'en rapporter ce qui m'a paru le plus néces saire et le plus propre à mon sujet. J'ajouterai ici e qui reste de cette histoire jusqu'au règne d'Hérode-le Grand. L'historien Josèphe, qui est entre les mains d tout le monde, satisfera la juste curiosité de ceux qu voudront s'en instruire plus à fond. On pourra auss consulter M. Prideaux, dont on trouvera ici une bonn partie.

§ 1. Règne d'Aristobule I, qui dure deux ans.

Hyrcan, grand-prêtre et prince des Juifs, avait laiss Av. J. C. 106. cinq fils en mourant. Le premier était Aristobule, l 1. 13, c. 19, second Antigone, le troisième Alexandre Jannée, l Id. de Bello nom du quatrième est inconnu. Le cinquième s'appelait Absalom.

etc.

jud. 1-3.

Aristobule, comme l'aîné, succéda à son père dans la souveraine-sacrificature, et dans la principauté temporelle. Dès qu'il se vit bien établi dans l'une et dans l'autre, il prit le diadême et le titre de roi, qu'aucun de ceux qui avaient gouverné la Judée depuis la captivité de Babylone n'avait encore porté. La conjoncture des temps lui parut très - favorable pour cette entreprise.

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