Prétendrois-tu nous gouverner encor, FA B LE V II. Le Mulet fe vantant de sa (1) Généalogie. Le e Mulet d'un Prélat fe piquoit de noblesse, Dont il contoit mainte proueffe. Elle avoit fait ceci, puis avoit été là. Quand le malheur ne feroit bon Qu'à mettre un fot à la raifon, (2) La suite de ses Ancêtres. FABLE VIII. Le Vieillard & l'Ane. Un Vieillard, fur fon Ane aperçut en paffant Un pré plein d'herbe & fleuriant. Ily lâche fa bête; & le Grifon se rue Me fera-t-on porter double bât, double charge? Notre ennemi, c'est notre Maître : Le Cerf fe voyant dans l'eau. Dans le criftal d'une fontaine, Un Cerf fe mirant autrefois, Dont il voyoit l'objet fe perdre dans les eaux, Tout en parlant de la forte, Un (4) Limier le fait partir : Ses Cornes, qu'on apelle Bois. (2) Fort menues. (3) Bois que l'on coupe de temps en temps. (4) Gros Chien, bon pour la chaffe du Cerf, Il tâche à fe garantir, Dans les forêts il s'emporte. Nuit à l'office que lui rendent Ses pieds, de qui fes jours dépendent. Il fe dédit alors, & maudit les (5) préfens, Que le Ciel lui fait tous les ans. Nous faifons cas du beau, nous méprifons l'utile; (5) Le bois du Cerf tombe, & revient toutes les années. Le Liévre & la Tortue. Rien ne fert de courir: il faut partir à point. Le Liévre & la Tortue en font un témoignage. Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point Ma commere, il vous faut purger Notre Liévre n'avoit que quatre pas à faire, l'entens de ceux qu'il fait, lorfque prêt d'être atteint, Il s'éloigne des Chiens, les renvoye (1) aux Calen des, Et leur fait arpenter les (2) Landes. D'où vient le vent, il laiffe la Tortue Elle fe hâte avec lentcur. Lui cependant méprife une telle victoire, Qu'à la gagcure. A la fin, quand il vit (1) S'en éloigne fi bien, que les Chiens ne peuvent le ratraper, & fe trouvent par-là dans le cas où eft un Créancier que fes Debiteurs renvoyent aux Calendes Grec. ques, terme de payement tout-à-fait chimérique, parce qu'il n'y a point de jour dans l'année que les Grecs ayent nommé Calendes; quand ferez vous hors de debie? demanda Pantagruel. Es Calendes Grecques, répondit Panurge, lorsque tout le monde fera content, &c. Pantagruel, Liv. III. chap. 3. La Fontaine fupofant fon Lecteur dejà inftruit fur ce point de Littérature fort trivial, & qu'on doit avoir apris au College, s'eft contenté de dire, que le Lievre renvoye les Chiens aux Calendes. (2) Terres fteriles, incultes, fort propres pour la chaffe. (3) Les Magiftrats marchent pofément. (4) Comme la Tortue, qui eft couverte d'une groe écaille. FAB L E X I. L'Ane diun Jardinier fe plaignoit au Destin De ce qu'on le faifoit lever devant l'Aurore. Et pourquoi? pour porter des herbes au marché. Lui donne un autre Maître; & l'animal de fomme J'attrapois, s'il m'en fouvient bien, Quelque morceau de chou qui ne me coûtoit rien: Il fut couché tout le dernier. Autre plainte. Quoi donc, dit le Sort en colere, Que cent Monarques pourroient faire. Nous fatiguons le Ciel à force de (2) placets. Nous lui romprons encor la tête. (1) Nul profit cafuel, nulle bonne aventure. (2) Demandes. |