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souples, courts et forts (et nous n'entendons pas seulement la partie située vers la queue', mais tout le rable), celui-là pourra porter plus avant les jambes de derrière sous celles de devant; et au moment qu'il le fera, si on lui soutient la main, il fléchira le train de derrière dans les astragales, et s'enlèvera de l'avant-main, de manière que par devant on lui verra le ventre et les génitoires. Il faut rendre la main dès qu'il exécute ceci, afin qu'il semble aux spectateurs agir de lui-même dans ce qu'on lui fait faire. Il y a des gens qui dressent leurs chevaux à ces airs, en les frappant d'une baguette au dessous des astragales ; d'autres même en faisant courir auprès d'eux quelqu'un qui, avec un bâton, leur donne des coups au dessous des cuisses et des bras 1. Quant, à nous, nous croyons, et nous ne cesserons de répéter que la meilleure méthode pour instruire un cheval, c'est de lui accorder quelque relâche dès qu'il a fait ce qu'on exige; car, comme dit Simon, ce qu'un cheval fait par force il ne l'apprend pas, et cela ne peut être beau, non plus que si on voulait faire danser un homme coups de fouet et d'aiguillon : les mauvais traitemens ne produiront jamais que maladresse et mauvaise grace. Il faut que le cheval, au moyen , prenne comme de lui-même les airs

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des aides

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1 Cela se fait encore dans le royaume de Naples, où l'on n'a point d'autre méthode pour dresser les chevaux aux courbettes et au passéger.

les plus beaux et les plus brillans; si dans les allures ordinaires on le fatigue jusqu'à le faire suer, et que dès qu'il s'enlève bien on le descende et le débride, on peut compter qu'après cela il en viendra volontiers à s'enlever de même. lorsqu'il sera monté. Tels sont les chevaux qu'on représente portant les dieux et les héros, et ceux qui les savent manier se font grand honneur. Le cheval dans ses airs est une chose en effet si belle, si gracieuse, si aimable, que lorsqu'il s'enlève ainsi sous la main du cavalier, il attire les regards de tout le monde; il charme jeunes et vieux; on n'en peut détacher sa vue, on ne se lasse point de l'admirer, tant qu'il développe par ses mouvemens sa grace et gentillesse. Que s'il arrive à celui qui possède un tel cheval d'être nommé commandant de la cavalerie, ou d'un escadron, il ne doit pas chercher à briller tout seul, mais à faire paraître avantageusement le corps à la tête duquel il se trouve. Or, s'il monte un de ces chevaux tels qu'on en voit vanter beaucoup, qui, s'enlevant haut et fréquemment ', avancent peu, il est clair que tous ceux qui le suivront iront au pas; or, que peut avoir de brillant un pareil spectacle? Mais si, animant son cheval, il conduit sa troupe d'un pas ni trop vite

Il y avait, du temps de Xénophon, des termes pour dire ce que nous appelons manier aux courbettes, piaffer, passéger, mais Xénophon les ignorait ou n'a pas voulu 's'en servir.

ni trop lent, tel qu'il convient pour montrer la vivacité, la bonne volonté et la grace des chevaux, s'il les conduit ainsi, leurs pieds battront la terre ensemble, et de tous ensemble, on entendra le frémissement de la bouche et le souffle des narines, ce qui donnera un air imposant non seulement au chef, mais à tout le corps qui le

suit.

En un mot, dès qu'on saura bien choisir les chevaux en les achetant, les entretenir de sorte qu'ils supportent le travail, et s'en servir comme il faut dans les exercices militaires, dans les manœuvres de parade et dans les combats, qui peut empêcher que ces chevaux, en de telles mains, n'acquièrent une nouvelle valeur, et le maître tout l'honneur qui lui en doit revenir si quelque dieu ne s'y oppose?

Nous croyons devoir marquer aussi comment il faut être armé pour faire la guerre à cheval. D'abord nous dirons que la cuirasse doit être faite à la taille quand elle joint bien, c'est tout le corps qui la porte; mais lorsqu'elle est trop large, les épaules seules en sont chargées; trop étroite, c'est une prison, non pas une défense. Et comme les blessures du col sont dangereuses, nous dirons qu'il faut le défendre, au moyen d'une pièce tenante à la cuirasse et de même forme col; car, outre l'ornement qui en résultera, cette pièce, si elle est bien faite, couvrira quand.

que

le

on voudra le visage jusqu'au nez. Le casque de Béotie nous paraît le meilleur; car s'unissant au collet, il couvre tout ce qui est au dessus de la cuirasse, et n'empêche point de voir. Que la cuirasse au reste soit faite de manière à n'empêcher ni de se baisser ni de s'asseoir. Pour couvrir le nombril, les parties naturelles, et ce qui les avoisine, on aura des pennes en nombre et en grandeur suffisante; et attendu qu'une blessure au bras gauche met le cavalier hors de combat, nous approuvons fort la défense qu'on a inventée pour cette partie, et qu'on appelle brassard. Ce brassard couvre l'épaule, le bras, l'avant-bras et la main de la bride, s'étend et se plie à volonté, en même temps qu'il pare au défaut de la cuirasse sous l'aisselle. Soit pour lancer le dard, soit pour

2

1 On appelait ainsi des lames circulaires couchées les unes sur les autres, 'en queue d'écrevisse, pour couvrir l'épaule et d'autres endroits du corps, sans nuire aux mouvemens.

1 Cette invention était sans doute d'Iphicrate, qui avait imaginé beaucoup de changemens dans l'armement: plusieurs de ses idées furent reçues. On a déjà vu Xénophon, dans le discours précédent, parler d'Iphicrate sans le nommer.

On peut remarquer que Xénophon ne donne point de bouclier à sa cavalerie. Dans le deuxième livre de l'Histoire, où il parle du bouclier des cavaliers, il faut prendre garde que ce sont des gens qui font le service tantôt à pied, tantôt à cheval. Il y eut de son temps, ou peu après, une grosse cavalerie bardée de toutes pièces; mais tout le monde n'ap prouvait pas l'usage de cette arme. Polybe même se moque quelque part de la contradiction que présentent ces deux mots, cavalerie pesante: «La cavalerie étant, dit-il, une chose de soi légère et mobile, comment « peut-elle être pesante ? »

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frapper de près, il faut lever le bras droit: on ôtera donc de la cuirasse ce qui s'oppose à ce mouvement, et on le remplacera par des pennes à charnières, qui puissent s'ôter et se remettre, et qui, dans l'action de lever le bras, se déploieront, dans celle de le baisser, se serreront. Cette pièce, qui se met autour du bras comme une bottine, nous paraît mieux séparée..... que fixée à la cuirasse. La partie qui demeure à nu quand on lève le bras droit, doit être couverte près de la cuirasse avec du cuir de veau, ou du cuivre; autrement on serait sans défense dans l'endroit le plus dangereux. Comme le cavalier court un péril extrême quand son cheval est tué sous lui, le cheval aussi doit être armé d'un chanfrein, d'un poitrail et de garde-flancs qui en même temps serviront de garde-cuisses au cavalier; mais surtout que le ventre du cheval soit couvert avec le plus grand soin, car cette partie, où les blessures sont le plus à craindre, est, outre cela, une des plus faibles. On peut le couvrir avec la housse même. Il faudra que le siége soit construit de manière à donner au cavalier une assiette plus ferme, sans blesser le dos du cheval. Ainsi doivent être armées ces parties du corps de l'homme et du cheval; mais les garde-cuisses ne couvriront ni le pied, ni la jambe de l'homme, qui seront bien défendus, si l'on a des bottes du même cuir dont se font les semelles. Ces bottes

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