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écrit, est ouverte, et il convient d'en attendre le résultat.

Quand nous sortons de la chambre des guides, l'heure de notre départ est proche. Déjà nos traîneaux sont dans la rue. A déjeuner, M. le Curé et M. le Vicaire de Zermatt nous font l'honneur de présider notre table. Et vers 1 h. la population de Zermatt assistait au défilé de nos huit équipages, sonnaillant sur la route gelée qui dévale vers St-Nicolas... et la plaine !

Cette descente fût exquise et féerique, malgré le froid mordant, qui nous « coupait » les oreilles. Qu'on se figure la vallée toute blanche dans ses rochers poudrés, un ciel d'un bleu velouté sur nos têtes, et de chaque côté de notre traîneau, le paysage filant à toute vitesse, avec ses bois, son torrent verdâtre, ses chalets patinés d'une teinte chaude, et, tout là-haut, de temps à autre, un grand sommet connu, guetté au débouché d'une gorge, Dome, Rothorn ou Weisshorn!

A St-Nicolas, on met pied à terre avec plaisir, pour suivre, remonter et redescendre les lacets sinueux et fortement verglassés du mauvais chemin muletier qui nous ramène à Stalden. Là, un wagon confortable du V.-Z. nous attend. Une demi-heure après, nous sommes à Viège, où la Commune nous offre une généreuse collation, très appréciée... comme toutes celles du voyage! Puis, dans la nuit tombée, voici de nouveau des traîneaux qui nous emmènent à Brigue an grand galop. Comme l'express a du retard, il y a, pour passer le temps à Brigue, d'autres collations encore.., jusqu'au moment où nous montons en wagon, en remerciant MM. Seiler pour leur large hospitalité et l'amabilité charmante qui a présidé à notre destin durant ces trois journées.

La question de savoir si Zermatt peut devenir une station d'hiver nous a été posée et a été débattue au cours de cette excursion. Y répondre par l'affirmative, rien de plus naturel, mais ce n'est pas la résoudre, car il faut tenir compte d'une inconnue dont l'importance est capitale : la possibilité d'exploiter en hiver la ligne du Viège-Zermatt. Nous croyons savoir que la Cie a mis le projet à l'étude. D'un autre côté, des démarches ont été faites dans la vallée pour arriver à grouper les intérêts de chacun et faire valoir les besoins et les désirs des habitants de toutes les communes à partir de Viège. Car il ne s'agit pas seulement des intérêts hôteliers; il s'agit surtout de relier au reste du monde, pendant six mois de l'année, une très nombreuse population que l'absence d'une route carrossable entre Stalden et St-Nicolas isole et mure en quelque sorte, dans les frimas, durant un long hiver.

On rappellera peut-être à cette occasion que jadis, les communes de Stalden et de St-Nicolas s'étaient opposées à l'établissement de cette route, et que la fâcheuse attitude prise alors contre ce projet les place seule aujourd'hui dans la situation dont elles cherchent à sortir. D'accord, mais aujourd'hui, ce ne sont pas ces deux communes, ce sont toutes celles de la vallée, unanimes, qui demandent qu'un service, réduit si l'on veut. mais un service quelconque, soit établi sur le V.-Z., d'octobre à mai. Elles justifient cette demande, d'abord en prouvant que le besoin s'en fait durement sentir pour les 3000 habitants intéressés, puis, en espérant que l'établissement d'un service fera de Zermatt un lieu de villégiature hiver

nale assez couru pour indemniser la Cie de tout ou partie des frais supplémentaires qui lui incomberaient de ce fait. Il ne nous appartient pas de porter un jugement sur ce dernier point. Mais nous pouvons exprimer notre opinion de clubiste à l'égard de Zermatt, station d'hiver.

Nous avons essayé de dire plus haut combien est original et grandiose le paysage de Zermatt sous la blancheur des neiges. Il y a là, pour les artistes, une mine inépuisable - et encore inexplorée de motifs merveilleux. C'est déjà bien quelque chose. Partout des chemins battus mènent facilement le promeneur dans les jolis hameaux à chapelles qui se nomment Winkelmatten, Platten, Zum See, Zmutt. On y peut aller à skis en coupant dans les pentes, ou le long des bois, et redescendre d'un trait à Zermatt. Les lugeurs, eux, iront sur le chemin du Riffel ou de Heueten. Quant aux patineurs, il serait facile de leur aménager le plus magnifique des emplacements entre la Viège et le village, où de grandes prairies plates semblent faites exprès.

Pourtant, dira-t-on, sans parler de la beauté du cadre, ne serait-il pas facile de trouver ailleurs les mêmes avantages, sans faire le voyage de Zermatt. Sans doute, mais ce qui, pour nous, au point de vue exclusif des sports d'hiver, place Zermatt au premier rang, c'est la facilité qu'on y trouve d'entreprendre, en plein mois de janvier, des ascensions de très haute montagne, dans des conditions de sécurité à peu près uniques. Le jour où les hôtels du Riffelberg et du Lac-Noir hébergeront les skieurs, ce qu'ils ont déjà fait ceux-ci auront à leur disposition le plus admirable champ d'excursions faciles que l'on puisse désirer dans les régions élevées des Alpes. Parmi les

grands sommets, nous en citerons deux, qui sont créés pour le ski: la Cima di Jazzi et le Breithorn. On est déjà monté au Rimpfischhorn, au Strahlhorn, au Mont-Rose; on a passé les cols d'Hérens, du Théodule, de l'Adler et du Weissthor. Dans toutes ces courses, peu ou pas de difficultés, même dans la région moyenne. la plus scabreuse pour le ski.

C'est là, nous le répétons, ce qui nous paraît constituer la supériorité de Zermatt sur d'autres stations de montagne. A Adelboden, à Arosa, à St-Moritz, on trouvera des champs plus vastes et moins accidentés, mais pas cette facilité d'aborder pour ainsi dire de plain-pied, et sans s'éloigner beaucoup d'un gîte confortable, les plateaux glaciaires de 3000-3500 m. et les cimes suprêmes des Alpes.

Enfin, l'altitude très favorable de Zermatt, sa position abritée, ses grands hôtels déjà installés pour les séjours d'hiver, lui assurent les plus précieux privilèges. Mais il est bien clair que tous ces avantages ne seront rien tant qu'on n'ira pas à Zermatt d'une façon plus rapide et plus commode. Là est, dit-on, la difficulté. Lorsqu'elle sera résolue, et elle le sera, le Zermatt d'hiver pourrait bien devenir une cité plus vivante encore que le Zermatt des beaux jours de juillet.

O. NICOLLIER,
Section de Jaman.

Chronique Alpine.

A propos du nom d'Aiguille des Chamois.

(Massif du Tenneverge).

L'article si clair et si varié que M. E.-R. Blanchet a publié dans le no 2 de l'Echo, sous le titre de « Quelques ascensions nouvelles », m'a d'autant plus intéressé qu'il traite en partie d'un domaine qui m'est devenu plus cher que tout autre dans les Alpes, car, durant trois étés, je l'ai parcouru jusqu'à ce que j'en aie gravi chaque sommet par un chemin au moins.

Il s'agit de la chaine qui s'étend du Buet à la Tour Sallières, dont j'espère pouvoir un jour écrire la monographie pour les Alpinistes de langue allemande. A cause de l'intérêt que je porte à ce massif, on m'excusera si j'ose émettre quelques remarques contre l'adoption du nom d'Aiguille des Chamois proposé par M. Blanchet; cela sans vouloir aucunement porter atteinte au droit qui appartient à ceux qui les premiers ont gravi un sommet, de le baptiser comme ils le jugent convenable.

1o. Dans ce massif, nous rencontrons exclusivement des noms populaires très anciens, tels que Tenneverge, Finive, Grenairon, Genévrier, Rosses, Ruan, etc., c'est pourquoi il me paraîtrait facheux d'intercaler dans cette rangée vénérable un terme qui porte en lui-même la date toute récente de son adoption.

2o. Le nom d'Aiguille des Chamois se trouve déjà dans la chaine des Aiguilles Rouges de Chamonix. Il est porté par la crête dentelée que l'on voit au sud-ouest de l'Aiguille de la Persévérance, dont elle est séparée par le Col de l'Aiguille.

3o. Le terme d'Aiguille a été appliqué tout d'abord et uniquement à des sommités de la chaine du Mont-Blanc. Entre Sixt et Barberine on ne le trouve nulle part. Il désigne toujours une cime élancée, et ce n'est guère que depuis le chemin du Fer-à-Cheval

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