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dans le canal de la Dominique, et, à huit heures du matín, il laisse tomber l'ancre à Waitahu par vingt-trois brasses de fond de sable fin, couvert au N. et au S par les deux caps extérieurs de la baie.

La difficulté de ce havre est de le reconnaître à temps, l'ouverture étant peu développée en raison de la profondeur; le plan et la description qu'en donne Cook, sous le nom de port de la Résolution, ne peuvent servir que par le travers et alors il est déjà trop tard pour manœuvrer, comme ses gisements l'exigent, puisqu'il faut presqu'en doublant le canal serrer Tauhauto pour passer à quelques toises seulement de la pointe N. de Waitahu, si l'on veut atteindre un fond où l'on puisse mouiller sans louvoyages longs et dangereux au pied de montagnes où les brises changent à chaque encablure, où les calmes ne sont interrompus que par des bourrasques inattendues. Aussi est-ce toujours par le N. que l'on doit conseiller d'aborder Waitahu, de quelque point de l'horizon qu'on l'ait d'abord aperçu.

Venant de l'ouest, le Pylade y est arrivé avec une promptitude inespérée, en s'élevant à petits bords à l'entrée du canal, afin d'avoir un vent constament frais, et sous la terre de la Dominique pour éviter les courants du milieu autant que pour profiter de la brise qui y suit la côte S. E. et N. O. dans cette partie.

Les amers doivent donc être pris au dehors du havre, et pour les bâtiments venant du nord dans cette position, ses pointes extérieures se confondent, elles ne paraissent former qu'une seule baie avec la terre la plus ouest de Tauhauto, quoique cet espace en renferme deux fort distinctes: l'une en dedans du cap ouest, nommée Hapatoni, ouverte au N. O. et placée directement sous le pic le plus élevé de l'île, l'autre Waitahu, dans le nord de la précédente, et de deux pitons qui sont dans le septentrion du pic, lesquels ont la forme de pignons surmontés de cheminées; enfin elle est ouverte à l'ouest et située au sud 15° est de la partie occi

dentale de la Dominique. Pour ne pas la confondre avec une autre baie qui la précède dans le nord, et qui possède aussi à peu près sous le même aspect deux villages séparés par un morne, on se rappellera que la plage de cette dernière est de sable blanc et l'autre gris foncé.

L'eau à Waitahu est excellente et très-facile à faire lorsque la plage est abordable. Ce port, exploré par Cook et par Marchand, a été revu récemment par la frégate la Vénus, dans son voyage de circumnavigation; dans la saison où les vents soufflent du nord à l'ouest, c'est un mauvais mouillage.

L'île d'Uapou est à vingt lieues O. N. O. ¦ N. de Tauhauto; la baie qu'habitent les missionnaires français est située par 9° 16′ de latitude sud et 142° 26' longitude ouest, c'est la première à l'occident des rochers détachés les plus N. E. de l'île, le village est à un mille dans l'intérieur, quelques hangards sont cependant sur la rive, il n'y a pas d'ancrage pour les bâtiments.

D'Uapou on aperçoit clairement, à dix lieues dans le nord, File Nu-Hiva, la plus importante de cet archipel; sa partie sud est découpée en baies vastes et sûres, nous avons déjà dit que celle de Taihoae était remarquable. Le capitaine Porter, de la marine américaine, en prit possession au nom des États-Unis, dans la dernière guerre de cette puissance avec l'Angleterre.

C'est à peu près la seule des Marquises fréquentée par les baleiniers; les hautes terres qui l'environnent font que les vents y soufflent de toutes les parties; en rangeant de trèsprès la pointe E., le Pylade est cependant parvenu au fond sans louvoyer. On y mouille depuis vingt brasses jusqu'à neuf; à ce dernier brassiage on était à portée de mousquet de la côte, et on aurait pu, en se plaçant par quatre brasses, poser des ancres entre la terre et le Pylade.

La baie d'Akani, habitée par les Taihoas est située immédiatement à l'ouest de Taihoae: son entrée est fort étroite

et fort difficile pour des bâtiments d'une certaine longueur, parce que ses pointes se croisent; cependant, après les avoir passées, le havre se développe et peut offrir un abri sûr. L'eau y est abondante et facile à faire.

De l'autre côté de Taihoae, dans l'est, se trouve le golfe profond de Taïpis; bien qu'il ait une roche dans son milieu, il renferme plusieurs bons mouillages; la multiplicité des ports sur cette partie sud de Nu-Hiva est le fléau de cette terre; elle fait naître entre les tribus une jalousie, des surprises, des combats, qui se résument par d'horribles festins et entretiennent les goûts de rapine et de férocité. Chacun veut avoir devant sa baie le bâtiment à ravitailler et refuse de rien vendre à la rade préférée, de là guerre entre eux et guerre à l'étranger sur un point où l'on ne veut pas qu'il se tienne en sûreté. Le bois de sandal est épuisé; les naturels, sans industrie, n'ont plus à présenter aux échanges que des aliments qu'ils prennent à la fois sur leur besoins et sur leurs plaisirs, car quinze mois à l'avance, parfois, il faut rendre le porc tabou, pour suffire aux approvisionnements des fêtes, dont la durée est toujours proportionnée à la quantité de nourriture que l'on a pu rassembler.

Le commerce des femmes est donc le seul qui soit bénéfice, et celui-là ne peut appartenir qu'à la population qui entoure le navire en relâche.

Nous avons déjà parlé des angoisses du capitaine américain Brown, chez les Taïpis. Il y a deux tribus de ce nom, limitrophes: l'une, au S. O. du golfe, consent à donner pour recevoir, l'autre, au N. E., préfère rançonner et doit être signalée pour ses astuces et ses violences. A Nu-Hiva même un baleinier avait donné lieu à un soulèvement en renvoyant les femmes de son bord.

Rien n'est donc plus précaire, en général, que la position des bâtiments marchands dans les archipels de la mer du Sud, et il serait instant de régulariser par la force, si décidément on ne le peut pas par la morale, ces populations

isolées, cédant à tous leurs caprices comme à tous leurs intérêts, accoutumées aux épisodes guerrières, s'y livrant par passe-temps, et abandonnées encore aux suggestions des déserteurs, cette lie de la civilisation, dont la voix est surtout puissante sur le sauvage, quand elle s'exerce à faire disparaître le prestige de notre supériorité. Le Supply, l'Elisabeth, la Pomaré, le Ramber, l'Astrolabe, le Research, la Joséphine et cent autres appellent l'attention des gouvernements. Je crois que la police de ces archipels pourrait ètre faite, dans des limites convenues, par les stations française, anglaise et américaine du grand Océan, qui détacheraient successivement ou simultanément un bâtiment chaque année.

La population des Marquises ne s'élève pas aujourd'hui au-dessus de 25,000 âmes, savoir: la Dominique 10,000, Nu-Hiva 10,000, Uapou 1,200, Tauhauto 800, Nakuka et la Magdelaine 3,000. Cet archipel est le seul, dans le grand Océan, qui n'ait point de récifs; l'inconvénient de ses bords est au contraire le grand fond, qui y donne beaucoup de ressac et rend partout l'accès de la terre très-difficile pour les embarcations.

On se perd dans la nomenclature de ces îles, sur lesquelles de nombreux découvreurs ont, à la même époque, hypothéqué leurs titres de gloire. J'ai suivi la prononciation des naturels et l'orthographe qui m'a été donnée par les. missionnaires les plus instruits dans la langue du pays.

Voici cependant un aperçu des noms que j'ai recueillis pour chacune d'elles :

1. Nouka-Hiva, Noukou-Hiva, Nogga-Hiva, Federal-Islands (Ingraham), Beaux (Marchand), Henry-Martin (Hergest), Adams-Islands (Roberts), Nu-Hiva.

2. Roua-Joua, île Adam (Ingraham), Trevaniou (Hergest), Jeffersen (Roberts), Marchand (Marchand), Uapou. 3. Tao-Wati, Wailao (Marchand), Sainte-Christine Mendana), Taou-Wata (Stewart).

4. Roua-Houga, Washinton (Ingraham), Riou (Hergest) Massachussea (Roberts), Uahuka.

5. Ohiva-Hoa, la Dominica (Mendana).

6. Otahi-Hoa, Fetou-Hiva, la Magdelena (Mendana). De Mangareva aux Marquises, nous avons eu encore cinq jours sur neuf des vents de N. E. au N. N. O. Il s'est trouvé 43 milles de différence au S. et 25 à l'E., ce qui fait 50 milles au S. 30° E., ou 5m 5 par jour.

Sous le vent des Marquises nous trouvons des brises du S. qui nous conduisent jusqu'au cinquième degré de latitude, où nous rencontrons les vents alisés de l'hémisphère septentrional du N. à l'E. qui nous poussent à Oahu.

Le 6 juin nous avons connaissance d'Hawai, l'île la plus S. E. et la plus considérable de cet archipel. Son volcan de Pouna-Hohoa est en pleine éruption, et ses flammes nous apparaissent toute la nuit à vingt lieues au large; ici encore le commandant avait dirigé sa route pour passer au vent des îles, afin d'éviter les calmes. Le 7 au jour, il doublait Mani, et bientôt la pointe du Diamant, qui est le cap S. d'Oahu; il voit alors Honolulu, son fort, ses clochers. Il mouille d'abord en rade, puis dans le port, par quatre brasses et demie, à portée de voix de terre, dans un canal formé par des récifs sinueux, dont aucun vent ne peut troubler les eaux paisibles.

Partant de Nu-Hiva, nous mettons dix-sept jours à nous rendre aux Sandwich; l'excédant des différences dans la totalité de la route nous donne 125 milles à l'O., et 25 au N., ou 128 au N. 78° O., qui font 7,5 par jour. Considérant à part chaque courant, nous aurions 15,4 au N. 58° 0. par vingt-quatre heures, entre Nu-Hiva et le cinquième degré de latitude N., où nous rencontrons les vents alisés de N. E. et les courants portant au S., 8' S. 29° O., entre ce cinquième degré et Honolulu.

Il serait superflu d'entrer dans les sujets épuisés; tout ou presque tout est dit aujourd'hui sur les Sandwich, vi

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