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que, et qui est connue dans le pays sous le nom bizarre d'a- ment sous la peau qu'il soulève de manière à simuler une veine bourkaïb on abourikiab (mot arabe qu'il traduit par bien arrivé, | variqueuse, affectant une disposion flexueuse que l'on constate bien abordė), maladie dont furent affreusement complimentés, par le toucher; pas de fièvre, appétit conservé, nul trouble dit-il, plusieurs de ses camarades. Les seuls symptômes qu'il fonctionnel. Tout le mal était limité à la plante du pied droit pnisse préciser de la maladie en question sont de grandes souf- et à l'articulation tibio-tarsienne du même côté, laquelle, doufrances de tête et de bas ventre accompagnées de jaunisse et leureuse à la pression, était gênée dans ses mouvements. Le de diarrhée. Il garda le lit une quarantaine de jours et la contraitement fut donc tout externe et mécanique. valescence traîna à peu près deux mois. Hadji-Youssouf observait strictement la pratique des ablutions prescrites par la religion musulmane. Il avait l'habitude d'aller nu-pieds dans les rues de la Mecque. Dans la première année de son séjour en cette ville, il lui est arrivé une fois, en passant devant un café, de marcher sur un charbon ardent qui lui a fait une phlyctène à la partie interne et moyenne de la plante du pied droit; aussitôt il y appliqua de la boue; la brûlure disparut dans peu sans laisser de trace.

Hadji-Youssouf a quitté l'Arabie dans le mois d'août 1857; il est à Constantinople depuis environ huit mois. Six mois après son arrivée dans cette ville, il commença à sentir vers la plante du pied droit une démangeaison qui devenait de plus en plus vive et insupportable; cette démangeaison dura une dizaine de jours; au bout de ce temps il se fit, précisément sur le point brûlé trois ans auparavant, une petite ouverture qui laissa voir l'extrémité d'un ver que le malade a reconnu être celle d'un fil arabe, car il en avait vu, dit-il, un bon nombre chez plusieurs individus en Arabie. C'est alors que le malade a été renvoyé à l'hôpital, où nous avons constaté l'état suivant:

Légère tuméfaction du pied droit avec rougeur plus prononcée vers la partie interne du coude-pied au devant de la malléole interne ; au bord interne de la plante du pied, à 4 travers de doigt au dessous de la malléole, au centre d'un tissu légèrement enflammé une petite ouverture ulcéreuse semblable à elle d'une fistule, laissant suinter un liquide roussâtre peu abondant; au milieu de ce liquide un corps filiforme, cylindrique, ressemblant exactement à un fil à coudre, blanc de lait, de grosseur moyenne; un fil arabe enfin pendait au dehors à travers la peau. dans une longueur de 2 centimètres. Saisi à l'aide d'une pince et tiraillé légèrement à plusieurs reprises, le fil résiste; relâché, il exécute un mouvement vermiculaire assez sensible pour être aperçu par le malade luimême et par tous ceux qui assistaient au service; sur le dos du pied, au voisinage de la malléole interne qu'il contourne presque, on aperçoit à l'œil le corps du ver placé immédiate

Arrêtons-nous un instant pour visiter la meilleure officine, que vous trouverez aussi vierge de toute préparation pharmaceutique de quelque valeur, que le plus effréné partisan des infinitésimaux pourrait le désirer, mais où, par contre, le sureau, la graine de lin et de coing, le Græcum album, le Yilandjiktasche (coquille de la Nerita nativa, remède infaillible contre l'erysipèlc), le Yilanboynouzou (corne du serpent) et autres simples précieux abondent. Une ordonnance tant soit peu héroïque, qui par hasard s'égarerait dans une de ces officines n'aurait pas même la chance d'y être préparée, non-seulement faute d'ingrédients dangereux, mais encore faute de quelqu'un qui pût la déchiffrer. Et remarquez encore une fois l'avantage d'un tel état de choses qui, obligeant tout praticien un peu consciencieux de préparer et de fournir lui-même ses médicaments, profite à la fois au malade et surtout au médecin, tandis que le pharmacista, parfaitement exempt de toute visite inquisitoriale et sans le moindre scrupule seientifique ou autre, peut librement s'adonner à la recherche des spécifi

1er jour.- Dès le premier jour le filaire fut saisi et pincé au moyen d'une baguette fendue, et après une légère traction exercée jusqu'à résistance, il fut enroulé sur la baguette qui fut elle-même fixée à la plante du pied par quelques tours de bande, Cérat simple en onctions sur les parties tuméfiées et cataplasmes émollients par dessus.

Le soin de répéter la même opération à la visite du soir fut confié au chirurgien élève de la salle avec recommandation de s'arrêter à la moindre résistance; même opération tous les jours à deux reprises matin et soir Le malade mangeait sa portion.

17 jour. — En agissant de la sorte, tout allait pour le mieux et déjà une grande partie du ver, qui mesurait 41 centimètres, avait été extraite en 17 jours sans fièvre, ni douleur, quand le chirurgien le rompit à la visite du soir en changeant un cataplasme. Le lendemain matin, à la visite, je n'ai trouvé au fond de la plaie qu'une production d'aspect nacré et de consistance cartilagineuse; l'extrémité inféricure du ver se trouvant enfoncée et ayant disparu dans l'intérieur des tissus, il nous a été impossible de la ramener; écoulement nul; tuméfaction générale de tout le pied s'étendant jusque vers la moitié de la jambe; peau rouge, distendue, brillante comme dans un érysipele; douleur vive à la moindre pression; fiévre allumée; le malade n'avait pu dormir la veille, souffrances. Onguent mercuriel en onctions sur les parties enflammées, cataplasmes émollients; chiendent tamariné pour tisane; diète.

tourmenté

par

des

18 jour. Rougeur et gonflement diminués; de plus, écoulement abondant d'un liquide sanieux; moins de douleur, moins de fièvre; le malade avait pu dormir; même prescription, et pansement simple.

21o jour. L'extrémité inférieure de l'animal mort restée sous la peau, agissant comme corps étranger, après avoir déterminé l'inflammation et entretenu la suppuration, s'est enfin échappée au bout de 4 jours, entrainée par le pus; le reste du

ques les plus rares, qu'il débite sans autre tarif que celui qu'il se compose d'après la crédulité et la fortune de ses clients.

Tout cela suffit, je l'espère, pour vous convaincre que le libre exercice de la médecine et de la pharmacie est préférable à tous ces réglements inventés par la civilisation européenne et dont on commence sérieusement à vous menacer. Mais si cela ne suffisait pas, je me féliciterais doublement de vous avoir engagé à me suivre, car j'ai ici, dans les eaux de Brousse, tout ce qu'il faut pour vous prouver, clair comme le jour, combien est absurde une loi qui ordonne que « toute • entreprise ayant pour effet de livrer ou d'administrer au public des « eaux minérales, demeure soumise à une autorisation préalable et à bien mieux là où chacun est libre d'exploiter sa propriété comme il « l'inspection des hommes de l'art. » Vous verrez comme tout marche l'entend, 'ou comme il ne l'entend pas.

Vous allez me dire peut-être que les eaux minérales devraient être

ver mesurait 9 centimètres. Dès ce moment le malade fut soulagé; la plaie, après quelques jours de suppuration de moins en moins abondante, se cicatrisa, et le malade commença à inarcher. 33 jours après son entrée à l'hôpital, le jeune soldat, guéri, le quitta le 3 juin pour retourner à son régimenta

Le 9 août dernier Hadji-Youssouf revient encore me trouver à la visite de l'hôpital, avec un pied légèrement gonflé qui le faisait boiter. Je l'arrêtai et lui fis de suite donner un lit. Cette fois-ci, dit-il, il ne s'agit pas de fil, car je ne sens pas les prurits précurseurs. Cette fois c'était le pied gauche qui était le siège d'une tuméfaction étendue jusqu'aux malléoles, d'un aspect lisse et comme démateux; rougeur foncée plus prononcée vers le milieu du dos du pied; point de cordons durs dessinés sous la peau par le du corps ver; douleur légère, plus sensibles sur le point indiqué. Cérat simple en onctions, application de cataplasmes émollients. Le lendemain, même état, même prescription. Le surlendemain, le 11, Hadji-Youssouf nous fit voir l'extrémité libre du ver qui avait percé la peau, dit-il, la nuit, sans douleur, après un léger prurit, c'était au niveau de l'articulation tarso-métatarsienne, vers le bord externe du dos du pied et presque sur le cuboïde qu'on voyait une petite ouverture donnant passage à un corps filiforme, cylindrique, très-mince, d'un blane nacré, gisant au milieu d'un liquide aqueux en très-petite quantité. Il était doué de mouvement apparent, car, relâché après avoir été tiraillé, il cherchait à regagner petit à petit le fond de la plaie. Il fut saisi immédiatement et attaché comme dans le cas précédent; le tout fut fixé sur le dos du pied par un bandage approprié. La tuméfaction des parties était diminuée; mouvement fébrile nul; le malade mangeait sa portion entière. Le lendemain le malade se plaignit de douleurs qu'occasionnait la baguette par sa pression sur les parties peu charnues de cette région du pied; on la remplaça par un petit linge roulé que l'on fixa au moyen de bandelettes de diachylon. La traction et l'enroulement s'opéraient chaque jour, matin et soir, par le chirurgien élève de la salle, et tout promettait une marche regulière et satisfaisante, lorsque le 7me jour de l'enroulement, à la visite du soir, le ver se rompit à la suite d'une traction peut-être brusquement exercée. Le lendemain matin, je trouve le pied tuméfié, douloureux. Le ver, au fond de la plaie, projet e cette matière crèmeuse d'aspect nacré, par la pression comme dans le cas précédent, provenant du liquide que renferme son corps. Cette fois je fus assez heureux, pour saisir

non seulement des sources de richesse pour leurs propriétaires, mais en même temps des sources de santé pour le public, de revenu pour l'Etat et de bien-être pour les habitants des localités où elles se trouvent. Mais avez-vous bien pensé quelles études i! faudrait faire à cet effet et quelles tribulations vous iriez créer là aux médecins, aux malades, et surtout aux propriétaires? Et pour commencer par vous même: vous et vos confrères vous avez depuis long-temps profité de la facilité d'envoyer des malades à Brousse et ailleurs, vous débarrassant ainsi de temps à autre de plaintes, dont vous ne connaissez pas toujours la cause, et croyez-moi, voilà un des grands avantages des sources pour les médecins. Pourtant vous ne vous êtes guère embarrassé de l'étude des propriétés de ces sources, pour la simple raison qu'on ne s'en est jamais occupé. Eh bien! cette obscurité sur leurs effets thérapeutiques peut n'être pas sans utilité pour le malade, car suivez mon raisonnement: une eau dont on connaît la composition et les effets on ne la recommande que dans certaines maladies, tandis que celle que l'on ne connaît pas, pourrait être utile et peut donc consciencieusc

l'extrémité rompue de l'animal et la ramener au dehors. Le ver fut pincé immédiatement par un petit morceau de roseau fendu et fixé sur le dos du pied comme auparavant. Après 5 jours de tractions réitérées, nous avions cru avoir ramené l'extrémité inférieure du ver sur le morceau de roseau, elle mesurait 8 centimètres ; la portion de l'extrémité supérieure en avait mesuré 18; le tout 26 centimètres. La plaie cependant avait peine à se cicatriser; un écoulement sanieux intárissable rous portait à croire à une seconde rupture qui aurait eu lieu, et à un reste de ver mort dans l'intérieur des tissus agissant comme corps étranger; effectivement quelques jours après, Hadji-Youssonf nous affirma qu'il avait retiré lui-même, au milieu des matières purulentes, un corps long de 3 à 4 pouces environ, et que c'était, non le reste de l'autre ver, mais un individu nouveau, car lui et le chirurgien l'avaient vu se mouvoir. Nous conservons toutefois des doutes sur ce point. Quoiqu'il en soit, dès ce jour tout commença à marcher vers le mieux, l'écoulement cessa, dans peu de jours la cicatrisation s'opéra et le malade reprit l'usage de ses membres, 21 jours après son entrée à l'hôpital, Hadji-Youssouf, parfaitement guéri, fut renvoyé pour la seconde fois à son régiment, le 10 jour du mois de septembre.

Remarques. Nous n'avons l'intention de faire ni l'histoire naturelle de l'helminthe, ni la nosographie du dragonneau; les auteurs depuis Hippocrate, et ceux surtout des trois derniers siècles en ont suffisamment éclairé les points obscurs pour qu'il nous soit facile aujourd'hui de reconnaître ce ver cutané et de l'extraire du corps de l'homme. La nature du dragonneau nous est connue depuis Kaempfer et autres, et son animalité est mise hors de doute; personne ne croit aujourd'hui à ces fables de serpents ou de dragons dont l'ignorance et l'amour du merveilleux avaient affublé l'histoire de ce dermozoaire; le dragon n'est plus qu'un ver; on ne prend plus un ver pour un nerf, pas plus que pour un dragon. Mais si les observateurs sont d'accord sur la nature, le siège, le traitement et enfin sur plusieurs points de la nosographie du filaire, il n'en est pas de même sur l'origine qu'ils lui assignent, ni sur le mode de pénétration de l'animal dans la profondeur des tissus: les uns préten

la

ment être recommandée dans toutes. Or comme le diagnostic médical est toujours encore un peu incertain, ne se pourrait-il pas que vraie maladie ayant été méconnue par vous, le malade souffrit justement de celle contre laquelle les eaux sont le plus efficaces. Vous n'avez donc qu'à envoyer simplement vos malades tenter leur fortune, sans avoir, comme vos confrères des pays, dont vous vautez tant l'organisation, l'embarras du choix d'un médecin à qui les adresser et qui aurait en outre l'indiscrétion d'exiger de vous un rapport détaillé sur leur maladie, pour servir de base au traitement. Vous n'avez pas même à vous soucier de leur prescrire un régime convenable qu'ils ne seraient pas en mesure de suivre, je vous l'assure.

Venons-en aux malades. Ceux-ci toujours sous le même prétexte, qu'on ne s'est pas occupé des eaux, prétendent en savoir autant que vous là-dessus, et ils se servent de ce subterfuge pour ne pas vous consulter. Ils se rendent donc à la source que bon leur semble, échappant ainsi au médecin, ce qui ne serait pas le moindre avantage des caux pour le malade, à en croire du moins quelques détracteurs de

dent que c'est la larve d'un insecte propre aux pays chauds déposée par piqûre et développée sous la peau, ou introduite par les boissons dans l'économie. Pour Linnéc, le filaire n'est que le gordius aquaticus modifié dans l'économie; pour Kaempfer, les eaux croupissantes que l'on boit généralement dans les pays chauds en renferme le germe; pour Chapotin et d'autres, vivant dans les eaux tagnantes et bourbeuses il pénètre directement dans la peau lorsqu'il est encore jeune et très-fin; ils affirment que ceux qui ont soin de ne pas marcher pieds nus en sont exempts. Il en est qui attribuent la cause de sa formation à l'usage du vin de palmier, du froment de l'Inde, etc. D'autres enfin ont recours à la doctrine aventureuse de la génération spontanée pour expliquer son existence dans les tissus de nos organes. Cette question d'origine et de mode de pénétration.éclairée, unie à celle des causes prédisposantes offrirait un intérêt réel sous le rapport de la prophylaxie. On a voulu expliquer la fréquence du filaire chez les Musulmans par la pratique des ablutions fréquentes auxquelles ils sont obligés par la religion, et qui les mettent en contact prolongé avec l'eau qui recèle le ver en germe; n'est-ce pas déjà présumer sur l'origine du dermozoaire n'est-ce pas déjà admettre l'opinion de Chapotin sur le mode de pénétration dans l'économie? Mais il faut remarquer que pour que cette assertion fût fondée, il faudrait observer chez les Musulmans plus d'attaques aux membres supérieurs qu'aux membres inférieurs; car dans la pratique des ablutions, la main et l'avant-bras sont en contact beaucoup plus prolongé que les pieds avec l'eau qui recèlerait le ver en germe ou en embryon. Or, c'est justement le contraire que nous prouve l'observation. Sur 181 cas, Grégor l'a vu 124 fois aux pieds, 35 aux jambes et 11 aux cuisses. Il est tout naturel que les Musulmans soient plus exposés qu'aucun autre peuple aux attaques de la maladie, car ce sont eix qui se trouvent plus souvent en rapport avec le foyer, ce sont eux qui fréquentent le plus les pays où le ver existe. Ce qu'il importe de noter, ce qui doit attirer l'attention des observateurs, c'est qu'il est une classe parmi les Musulmans, la classe

l'art. Là pas de récipiendaires, pas d'honoraires; ils trouvent donc pour leur bourse une belle et bonne économie et grâce aux auxiliaires tout puissants de toute cure d'eaux minérales: deplacement, distractions, régime et exercice, conditions admirablement remplies par le voyage à Brousse, grâce encore aux arrangements qui, comme vous le verrez, empêchent les eaux d'être par trop efficaces, les malades n'ont que rarement à se repentir de leur manque de déférence pour votre science. Quant aux propriétaires,ah! il faut voir l'aménagement le leurs bains! Mais avant tout, permettez quelques mots sur les Eaux de Brousse. D'après ce que vous en ont dit vos pères et d'après les fantasie d'un auteur fort respectable, je suis sûr que vous vous attendez à trouver quatre ou cinq sources bien différentes; qu'à Tchékirghé, Eski-Kaplidja et Kara-Moustafa, vous allez voir et goûter des eaux ■ alcalines acidules, piquantes et agréables à boire; » qu'à Kukurtlu et à Yeni-Kaplidja vous verrez des eaux présentant la couleur, le goût, l'odeur, tous les caractères enfin des thermes fortement

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des riches ou des gens aisés qui est presque à l'abri des attaques de cette maladie, bien qu'assujettie de la même manière aux ablutions que la classe intérieure ou des pauvres, chez qui le mal sévit d'ordinaire. On doit aussi remarquer qu'il est une organisation générale, un tempérament, qui prédispose puissamment à la maladie, c'est le tempérament pituiteux ou lymphatique, caracté risé par des chairs molles et un sang aqueux. Quelques observations analysées dans ce but suffiraient pour justifier cette assertion, si d'ailleurs elle n'était même pas appuyée du témoignage de Kaempfer, qui nous apprend que chez les individus caco hymes le ver met plus de temps à se détacher des organes auxquels il adhère, que chez ceux qui sont placés dans des conditions opposées. On comprend qu'il en soit ainsi, les tissus lâches des individus cacochymes laissant plonger le ver plus profondément dans les organes.

Concluons donc de toutes ces remarques que rien ne prouve qu'aucun peuple (1) soit plus apte qu'un autre à contracter la maladie; qu'en général, ce sont les pauvres qui en sont atteints, parce que ce sont eux qui, par habitude ou économie forcée, marchent très-souvent pieds ou jambes nus, et donnent ainsi prise à l'introduction du parasite; et qu'enfin ce sont surtout les individus cacochymes et lymphatiques qui sont le plus maltraités, leurs chairs molles et flasques favorisant l'accès du ver en germe ou en embryon.

Le cas de filaire qui fait le sujet de notre observation n'offre en lui-même rien de particulier, si ce n'est qu'il prouve une fois de plus que le filaire at aque de préférence les individus à tempérament lymphatique; que les membres, surtout les inférieurs, sont le siège de prédilection du mal; que le ver est immédiatement placé sous la peau; qu'après une incubation dont la durée n'a pu être fixée, il se fraye lui-même un passage à travers le tégument; qu'il peut terminer son évolution presque

(1) Il faudrait toutefois rechercher si la race noire offre plus ou moins de susceptibilité que la race blanche à contracter le fil arabe. C'est à une statistique, consciensieusement dressée dans ce but, à nous donner la solution de cette question.

sulfureux, « contenant sur dix litres d'eau plus de trois grammes d'hydrogène sulfuré »!

Eh bien, je vous l'avoue, quoiqu'assez sceptique de mon naturel, je m'y étais laissé prendre comme vous. Intrigué en outre par les on dit les plus contradictoires, mais également bien accrédités parmi les médecins et le profanum vulgus, sur la disparition ou l'augmentation du soufre à la suite des tremblements de terre, je tenais à vérifier par moi-même ce fait qui n'est pas sans quelque importance. Muni done d'un appareil assez formidable de fioles et de tubes je commençai mon attaque. Le croirez-vous? Malgré les prétentions des différents propriétaires, à la source même du Kukurtlu je dus me contenter d'une odeur à peine perceptible à la meilleure des volontés, mon réactif lo plus subtil se refusant à reconnaître ce soufre tent vanté, tandis qu'à celle du Yeni-Kaplidja ce gaz voulut bien manifester sa présence, non seulement par son agréable effet sur mes nerfs olfactifs, mais par d'autres signes non moins équivoques. Mon thermomètre s'obstina à accor

sans mouvement fébrile dans le cas où il n'y aurait pas de cette armée plus particulièrement sur cette étude, que d'accident de rupture; et que l'enroulement sur une nous nous sommes décidé à donner de la publicité à baguette fendue ou un linge et les topiques émollients, cette observation. pour calmer l'irritation locale, suffisent presque toujours pour expulser le ver en peu de temps.

SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DE MÉDECINE. COMPTE-RENDU DES SÉANCES des 22 octobre et 5 novembre,

1858.

Présidence de M. LEVAL.

Séance du 22 octobre.

La parole est accordée à M. TIAN qui donne communication d'un cas d'hydrophobie observé à Ortakeuï (voir plus

haut aux mémoires originaux).

Quant aux accidents consécutifs à la rupture, nous pensons qu'ils sont uniquement dûs à cette matière crèmeuse projetée par l'animal rompu qui, en se retirant, la porte avec lui dans l'intérieur des tissus qu'il en imprégne. Cette manière de voir nous paraît fondée sur ce fait d'observation que plus l'animal plonge profondément dans les tissus, plus les accidents consécutifs sont graves. La seule particularité qui mérite d'être notée dans notre observation, c'est l'habitude de Hadji-Youssouf de marAu sujet de cette communication, M. FAUVEL expose cher pieds nus, ce qui vient à l'appui de notre opinion que se trouvant à Ortakeuï le mercredi, 13 octobre, et sur les causes prédisposantes de la maladie. Quant à la ayant appris qu'il y avait un individu atteint de rage dans le circonstance exceptionnelle de la brûlure du pied droit, village, il demanda à voir le mal de: il le trouva dans une bouqui pourrait faire croire de prime abord à la nécessitétique, debout, parlant et gesticulant Du reste il répondait bien d'une solution de continuité pour l'introductiou du ver, aux questions et ne proférait aucune menace. Il se plaignait de nous pensons que si le germe ou le jeune animal renfer-manquer d'air et, portant sans cesse la main au larynx et à mé dans la boue a pu s'introduire par cette voie, c'est la partie supérieure de la poitrine, il accusait là un sentiment par un pur effet du hasard; car le pied gauche n'était le siège d'aucune solution de continuité.

de constriction qui l'étouffait. Il voulait à toute force être saigné. La face était grimaçante, les yeux brillants, injectés, les pupilles très dilatées, le pouls médiocrement développé, régulier, sans fréquence.

La question du filaire offre en elle-même un intérêt local tout particulier: d'abord, quoique non endémique M. FAUVEL examina sans difficulté la bouche et la gorge; à Constantinople, il n'est pas très-rare d'y rencontrer ce le malade sortit sa langue qui était un peu sèche comme celle ver chez des personnes venant des pays où il est endé- d'un individu qui a beaucoup parlé sans boire; il n'y avait mique; en second licu, elle intéresse directement la rien d'anormal à la partie inférieure de cet organe, non plus santé générale de l'armée ottomane. En effet, celle-ci qu'au pharynx. M. FAUVEL présenta de l'eau, dans une cuiller, n'est-elle pas sans cesse exposée aux atteintes de ce au malade qui but sans aucune répugnance; mais à peine le parasite dans les contrées brûlantes où il sévit quelque-mouvement de déglutition était-il accompli que survinrent les fois épidémiquement? D'après le rapport de Grégor, en spasmes décrits par M. Tian: cette agitation convulsive, ce 1789, à Bombay, 300 soldats du 86 régiment en furent crachottement spasmodique d'une salive mousseuse; peu de soudainement atteints; n'y a-t-il pas là une puissante temps après le calme se rétablit. M.FAUVEL interrogea les perinfluence de la chaleur et d'autres phénomènes météo-sonnes présentes sur les antécédents du malade. On lui dit rologiques à étudier ? C'est dans la connaissance des causes occasionnelles et prédisposantes du filaire qu'on pourrait puiser les éléments d'une hygiène propre à l'armée d'Arabie; c'est pour attirer l'attention des médecins

der au Yeni-Kaplidja six degrés de plus qu'au Kukurtlu qui n'en mon-
trait
que 76° C. (ce qui n'est déjà pas mal), n'en concédant
que 56 au
Kara-Moustafa et 46o seulement au Tchékirghé. Je dus même réduire
celle-ci par évaporation à la cinquième partie de sa consistance natu-
relle pour la décider à montrer une réaction alcaline, pareille du reste
à celle de toutes les autres eaux de Brousse. Enfin je fus bien obligé
de reconnaître toutes ces eaux comme parfaitement incolores, sans
goût ni saveur aucuns, tout aussi fades les unes que les autres, et ne
subissant, en se refroidissant, aucun autre changement que celui de se
couvrir d'une légère pellicule de crenate de chaux pas le moins du
monde iridisante.

En énonçant de telles énormités je m'expose, je le sais, aux récriminations les plus acerbes; mais, toujours sans peur, sinon sans reproche, je résume mon opinion: toutes les sources chaudes de Brousse me paraissent identiques dans leur composition; par leurs principes minéralisateurs elles doivent être classées parmi les Calcaires légère

que cet individu avait déjà éprouvé des accidents analogues, une fois à Patras, une autre fois en Crimée; qu'il était adonné aux boissons alcooliques, que l'affection actuelle avait débuté trois jours auparavant à la suite d'un violent accès de colère, enfin que cinq mois auparavant il avait été mordu à la main

ment bicarbonatées; provenant toutes du même terrain primitif —assertion qu'autorise ce fait que toutes, pendant le tremblement de terre, changèrent leur cours pour le reprendre immédiatement après—la variété de leur température (460 - 82o cent.) et de la quantité des principes minéralisateurs peu abondants (d'environ 5-8 décigrammes par kilogramme d'eau) dépend de ce que, dans leur trajet souterrain, elles se mêlent plus ou moins à des sources d'eau froide qui coulent en grande abondance des flancs de l'Olympe; les eaux de Yenikaplidja et, à un moindre degré, celle du Kukurtlu présentent à leurs sources quelques caractères des eaux sulfureuses accidentelles, Probablement que dans la dernière partie de leur trajet elles traversent des terrains où elles rencontrent des Schistes ou des Sulfates; sous l'action de la haute température des eaux, ceux-ci se décomposent par les matières organiques et donnent lieu à la formation et au dégagement du gaz sulfhydrique, que l'on aperçoit à la source seulement, et qui n'est nullement incorporé à l'eau,qui,refroidie,n'en offre plus la moin

par un chien. M. FAUVEL constata en effet une cicatrice à la face dorsale de la main gauche. Prenant en considération les antécédents du malade qui était adonné aux boissons alcooliques, les deux attaques antérieures, prétendues analogues, le début des accidents actuels à la suite d'un accès de colère, la durée de la maladie, le temps écoulé depuis la morsure, le manque de renseignements sur l'état du chien, le caractère même des symptômes offerts par le malade, M. FAUVEL émit l'opinion que l'état morbide dont il s'agissait pourrait bien n'être qu'une des formes du délire alcoolique, malgré l'absence de tremblement des mains et de la langue au moment où il examinait le malade. Telle fut alors son impression.

M. PASCAL partage l'opinion de M. Fauvel; le malade avait éprouvé une colère soutenue à la suite d'une querelle avec un de ses voisins qui le poursuivit le couteau à la main. Il avait, continue M.PALCAL, devant sa porte un chien qu'il nourrissait et qu'il était fréquemment obligé de défendre contre les attaques des autres chiens du quartier; c'est par un de ces chiens probablement qu'un soir du dernier hiver il a été mordu; mais aucun chien dans le village n'a présenté de ptômes de rage.

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M. PASCAL réplique que tous les voisins ont été questionnés et tous ont dit que cet homme, étant sorti pour chien, avait été mordu par un des chiens du quartier. M. FAUVEL fait remarquer que les renseignements de M. Pascal auraient une grande valeur s'ils pouvaient être précisés avec exactitude.

M. le PaÉSIDENT invite M. Pascal à faire de nouvelles investigations à ce sujet.

M. TIAN propose de renvoyer la question à la commission qui s'occupe de la

rage.

M. CIPRIANY approuve l'opinion de M. Tian, mais il sera difficile, selon lui de déterminer avec précision quel chien avait mordu le malade; et puis, l'autopsie n'ayant pas été faite, on ne peut savoir s'il n'y avait pas chez cet homme des altérations dans l'appareil cérébro-spinal. Souvent, poursuit M. CIPRIANI, un chien enragé mord un autre chien sans lui communiquer la rage. Il a vu à Florence cinq cas de rage; un de ces cas tendrait à prouver que la morsure par un chat enragé donne lieu à un dévelopement plus rapide

dre trace. (2)

L'argent (Gumusch) que le peuple dit se trouver dans les eaux n'est probablement qu'une création de leur amour-propre légitime, mais le mercure dont parle le propriétaire et qu'ont vu des gens fort respectables provient bien-sûr- des thermomètres cassés des baigneurs. Heureux les optimistes qui, comme moi, savent promptement se

(1) A en juger par la Monographie du Docteur Bernard: Les Bains de Brousse, publiée en 1812, on croirait que la quantité de gaz sulfhydrique a considérablement diminué. Il existe cependant une analyse publiée en 1851 par le D. Smith, de la Nouvelle Orléans, qui constate une proportion beaucoup moins considérable de gaz que celle de M. Bernard, bien que plus grande encore que celle que j'ai pu vérifier. Sous les autres rapports, mes observations s'accordent avec celles de M. Smith dont je n'ai pas la prétention de vouloir égaler le mér te comme traval scientifique et sous le rapportde l'exactitude chimique; je me sens donc disposé à croire que par suite des commotions volcaniques la température et le volume du gaz du Kukurtlu ont un peu

diminué et ceux de Yeni Kaplidja augmenté.

M.le D.Temple, établi à Brousse depuis plusieurs années, prépare un travail, qui donmera des renseignements plus détaillés sur la composition et l'effet des eaux de ce pays.

de la maladie que la morsure par un chien. Le malade dont il est question était à peine indisposé le matin et cependant il mourut le soir après un violent accès rabique. M. CIPRIANI SE rappelle, en outre, un cas analogue à celui relaté par M. Tian, où, après des intervalles de calme pendant lesquels le malade pouvait avaler facilement, la dysphagie reparaissait.

M. TIAN. Les arguments de M. Cipriani fondés sur l'absence d'autopsie tendraient à faire admettre l'inutilité de recherches propres à élucider une question si importante; mais trouve-ton dans les auteurs des altérations propres à la rage? quiconque aurait vu le malade, pendant le calme, aurait cu la même opinion que MM. Fauvel et Pascal. En venant exposer ce cas je désirais, avant de me prononcer, entendre discuter le diagnostic devant la Société; mais si je devais exprimer ma manière de voir à ce sujet, prenant en considération que vers la fin les accès ont été continus et qu'il y avait des cicatrices, je n'hésiterais pas à admettre une hydrophobie rabique.

M. CIPRIANI n'a pas émis l'opinion que le bistouri aurait décelé des altérations propres à la rage, mais d'autres altérations peu t-être des centres nerveux qui auraient exclu l'idée de la rage. Du reste il incline à admettre que, dans ce cas, il s'agissait d'une véritable hydrophobie rabique.

considérer le cas en question comme un cas d'hydrophobie M. TIAN voit clairement que M. Cipriani n'hésite point à rabique, et se sentant fort de ce que M. Cipriani vient d'avancer à l'appui de sa manière de voir sur le diagnostic, retire sa proposition d'envoyer la question à la commission qui doit s'occuper de la rage.

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propose que M. Stampa, qui a vu le malade à l'hôpital,donne les renseignements qu'il a pu recueillir dans les derniers moments.

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M. STAMPA prend la parole: ayant appris, dit-il, du malade qu'on venait de transporter à l'hôpital, qu'il avait été par un chien à la main, cinq mois auparavant, il ordonna qu'on le liât. A ussitôt, en entendant cet ordre, le malade voulut se jeter sur lui; M. STAMPA se retira pour revenir alors que le malade serait attaché. Il accusait de la douleur à la tête et demandait sa femme et ses deux sœurs, M. Stampa lui demanda s'il voulait manger, il dit que oui; s'il voulait du vin, il ne répondit pas; s'il voulait de l'eau, il eut un accès de fureur. M. STAMPA se retira n'ayant pu éviter que le malade crachât sur lui. Ses yeux étaient injectés, la peau sèche et froide, et une bave abondante coulait de la bouche. Vers le consoler d'une illusion détruite! Sans doute désormais je ne pourraj plus concéder aux Eaux de Brousse la place distinguée parmi les thermes sulfureux, alcalins et ferrugineux que, par simple respect pour la tradition et pour des autorités récommandables, j'aurais désiré leur assigner; mais je ne réjouis d'avoir à leur reconnaître un ensemble d'éléments chimiques et de thermalité qui doit en faire un agent curatif des plus puissants.

Chaque eau minérale représente un agent thérapeutique dont on saurait juger l'effet à priori,ni pas la quantité absolue,ni par la qualité de ses principes minéralisateurs. Par des circonstances que, ni l'état actuel de nos connaissances pharmacodynamiques ne saurait apprécier, ni l'art imiter, ces principes sont combinés de manière à former une indivi dualité ou entité spéciale qui s'adresse à l'ensemble des organes pour produire l'ensemble des phénomènes, dont dépend leur efficacité incontestable dans la plupart des maladies chroniques; et je me plais à le répéter, quoique peu caractérisées par la prédominance d'un seul prin

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