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si cette prépondérance augmente, la vapeur s'atténue, se divise, le moment vient où chacun de ses globules, se trouvant très-petit et séparé de tous les autres, est aisément cerné par la compression extérieure qui condense son enveloppe : c'est alors un ballon au sein duquel l'expansion recueillie, concentrée, redouble d'énergie: le globule de vapeur est parvenu, en ce moment, à l'état gazeux.

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L'élasticité est la propriété de ce globule, et généralement de tout corps en état de dilatation intestine, coërcée par une enveloppe qui en arrête le développement. Les liquides ne peuvent être élastiques, chacun de leurs globules est d'une densité uniforme; mais tous les solides ont plus ou moins d'élasticité.

« L'expansion d'un liquide se fait par une progression égale et soutenue; l'expansion de tout corps élastique se fait par une suite de vibrations, c'est-à-dire par une succession de secousses formées, chacune, d'un mouvement de contraction et d'un mouvement de dilatation, celui-ci toujours un peu plus énergique c'est par ce progrès convulsif que le ressort se débande.

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Lorsque, dans un corps élastique, tous les globules intestins commencent ensemble leur vibration et la terminent ensemble, ce corps est sonore; si les vibrations sont confuses, désordonnées, inégales entre elles, le corps élastique ne peut rendre que du bruit. La matière du son n'est ainsi que l'émission continue des globules vibrans transpirés par le corps élastique; la percussion produit sur le corps élastique le même effet qu'une pression brusque sur une éponge imbibée; elle contraint la transpiration des globules vibrans à devenir plus abondante, ce qui la rend sensible pour nous: le milieu qu'elle traverse ne sert qu'à la tenir en faisceaux; et cette condition lui est nécessaire pour que notre organe puisse la saisir.

» La théorie du son est exactement la même que celle de la lumière, parce que le son est, comme la lumière, un fluide rayonnant, lancé par expansion, et composé de globules vibran's.

Voici l'application la plus importante et la plus féconde de la propriété élastique :

» Les étres organisés sont des êtres élastiques dans le sein desquels les globules vibrans sont spécialement rassemblés dans des foyers particuliers ayant entre eux des relations soutenues à l'aide de fibres ou canaux : cet appareil n'existe pas dans les êtres élastiques inorganisés ; leur expansion vibrante se fait indifféremment de chaque point vers la surface.

>>> Dans les plantes, les relations organiques sont très-simples, parce que les canaux qui les établissent ne se replient pas sur eux-mêmes, et ne s'abouchent point entre eux; il n'y a pas circulation. Dans les animaux, l'organisation est d'autant plus élevée que la circulation des globules vibrans est plus multipliée, et, par ce moyen, la correspondance générale plus rapide, plus intime. L'homme est le plus parfait des êtres organisés.

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Chaque organe ou foyer de vibration, dans un être organisé de nature quelconque, exécute sa vibration particulière il y a santé ou harmonie dans l'ensemble de cet être lorsque tous les organes exécutent des vibrations concordantes entre elles, lorsqu'ils forment un véritable concert; il y a, au contraire, maladie, lorsque les vibrations des divers organes sont discordantes entre elles : dans les êtres organisés des classes supérieures, cette discordance se manifeste par la fièvre.

» Dans un être organisé d'un genre quelconque, le progrès de la vie ne fait que détendre sans cesse la vibration générale, c'est-à-dire rendre progressivement, dans chaque organe, le mouvement de dilatation plus fort que le mouvement de concentration; c'est toujours l'expansion qui augmente de droits et de puissance. Lorsque le ressort est pleinement détendu, la vie est terminée : l'expansion alors est rapide; mais surtout elle est soutenue et sans vibrations, comme dans les liquides.

» Les êtres organisés qui vivent avec modération prolongent la durée de leur vibration vitale; ceux qui recherchent des jouissances vives et multipliées la précipitent : ainsi l'exige la loi des compensations.

« Les êtres organisés sont susceptibles d'une propagation indéfinie, parce que leur expansion intérieure s'emploie à

former, dans leur sein, un nombre indéfini de nouveaux foyers de vibration vitale. Ces foyers, ces graines, ces semences, ces embryons, n'ont plus besoin ensuite que d'être déposés en des lieux favorables à leur expansion : c'est ainsi que chaque plante, livrée à tous ses genres de propagation, couvrirait bientôt de plantes semblables à elle-même tous les climats qui lui conviennent; mais cette expansion génératrice est limitée, réprimée par l'extension également indéfinie de toutes les plantes qui peuvent végéter dans les mêmes climats. Indépendamment des consommations de l'homme et des animaux, les plantes se contraignent mutuellement à se mettre en équilibre de propagation.

» Il en est de même des animaux : l'extension génératrice de chacun est modérée, balancée par l'extension génératrice de tous les autres.

» L'homme éprouve et un besoin et une répression semblables, mais d'un emploi beaucoup plus multiplié, parce qu'il est d'une nature bien plus riche, bien plus élevée. Chacun de nous, avide de prospérité, de bien-être, d'extension, de plaisir, de renommée, ne peut rester satisfait et paisible qu'autant qu'il modère lui-même l'expansion qui l'anime : s'il s'abandonne à son ardeur, il rencontre bientôt la résistance de ses semblables, résistance qui procède de leur expansion, et qui, si elle est écartée avec violence, se rallie, devient à son tour hostile, brusque, oppressive. Les lois humaines d'un genre quelconque, les lois d'administration, les lois de justice, ne font jamais que régler la réaction de l'expansion commune contre les usurpations de l'expansion individuelle : toute loi humaine est une forme sociale donnée à la loi unique et universelle, à la loi des compensations.

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Enfin, chaque peuple est une fédération d'êtres expansifs, fédération qui tend sans cesse à l'accroissement et à l'augmentation de prospérité, de territoire, de célébrité, de tous les genres de jouissances: cette expansion, tant qu'elle est limitée par la sagesse, demeure principe de force et d'harmonie; mais, favorisée par l'imprudence, échauffée par l'ambition, elle excite la réaction expansive des peuples environnans; elle en provoque l'union et l'énergie. Le peuple

ambitieux sans modération ne fait qu'appeler les catastrophes: la terre a retenti de la violence de ses mouvemens; bientôt elle s'épouvante du fracas de sa chute: s'il n'est relevé par une main ferme et conciliante, il s'écrase et s'anéantit.

» Je viens de résumer les faits les plus généraux; ils peuvent être considérés comme les racines, le tronc et les branches principales de l'arbre universel; de là procèdent les branches secondaires, et successivement les rameaux, les feuilles, les fleurs, les fruits.

» J'ai tâché de suivre tous les détails de cette production admirable: c'est l'objet de mon ouvrage.

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Tel est en effet le système que M. Azaïs a développé dans son principal ouvrage, et dans ceux que depuis il lui a adjoints (1).

(1) Ces différens ouvrages sont les Cours de philosophie générale, 8 vol. in-8°; le Précis du système universel, 1 vol, in-8°; l'Explication universelle, 4 vol. in-8°.

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ÉCOLE THÉOLOGIQUE. ·

M. LE COMTE JOSEPH DE MAISTRE,

NÉ EN 1753, MORT EN 1821.

SANS avoir épuisé tous les écrivains que peut compter l'école sensualiste, nous en avons cependant assez examiné pour que toutes les nuances d'opinions qu'elle renferme dans son sein aient leurs représentans dans la revue que nous venons de passer. Comme notre but n'est pas de faire une biographie des philosophes, mais une critique des philosophies qui ont paru en France de notre temps, ce dessein n'exige pas que nous n'omettions personne, mais seulement que nous n'omettions pas les doctrines qu'il faut connaître. Or, nous ne voyons pas, d'après ce qui a été dit, quel système reste encore, avec le caractère sensualiste, qui n'ait son analogue et son type dans quelques uns de ceux que nous avons exposés. Quel est le condillacien, l'idéologue, qui ne retrouve sa pensée soit dans le livre de Cabanis, soit dans celui de M. de Tracy, soit dans le catéchisme de Volney, soit dans les leçons de Garat ; qui ne l'y trouve avec sa nuance, ses modifications et ses correctifs? Ce sont là, à les prendre chacun dans leur point de vue et avec leurs idées, les maîtres, les seuls maîtres qui, sur le texte de Condillac, aient publié une opinion importante et répandue. Exceptons-en toutefois M. de Gérando, M. la Romiguière et M. Maine de Biran, dont plus tard nous parlerons, et qui, à leur entrée dans la carrière, furent un moment dans la voie de l'idéologie; mais du reste c'est là tout, du moins tout ce qui excelle. Nous pouvons donc clore cet examen pour passer à un autre, et laisser les sensualistes pour venir aux catholiques,

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