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de Fréderic, et l'établissement d'une académie toute française au centre de l'Allemagne, étouffaient peu-à-peu l'intérêt pour la spéculation. Le peu de vrais philosophes et de wolfiens qui restaient encore se taisaient faute d'auditoire. Dans les chaires de philosophie, on ne professait plus qu'une doctrine ecclectique et superficielle, venue d'Angleterre et de France. Une métaphysique frivole et phrasière avait dégoûté tout le monde d'une étude plus sérieuse, et l'insouciance était devenu (ainsi qu'elle a déjà commencé à l'être en France, trente ans avant la révolution) la seule philosophie qui eût cours'. Voilà ce qui fit accueillir avec

I

J'ai parlé plus au long de l'état de la métaphysique en Allemage, avant Kant, et de quelques autres objets, dans une Notice imprimée, il y a près de quatre ans, dans un journal qui se publie en Basse-Saxe. Le citoyen François de Neufchâteau a trouvé bon de faire entrer cette notice dans un recueil de morceaux inédits, qu'il a intitulé Conservateur.

tant de froideur un livre, qui d'ailleurs était écrit d'un style très-concis, trèsénergique, et par- là très-inintelligible pour la plupart des lecteurs ainsi disposés. Telle est peut-être aussi la réception qui attend son interprète en France.

Mais enfin cet état de choses changea; l'esprit spéculatif se réveilla puissamment, et l'on sait depuis quelle fermentation singulière a excité en Allemagne le Kantianisme ; fermentation qui laissera de longues traces, et qui caractérise une des époques les plus importantes de l'esprit humain, où la spéculation a été poussée à son plus haut point, par les disciples de Kant, et par ceux de leurs adversaires qui étaient de force à se mesurer avec

eux.

se

A la Critique de la raison pure, rapportent principalement ces deux autres ouvrages de Kant: PROLEGOMÈNES, OU Traité préliminaire à toute métaphysique qui désormais tenterait de paraître comme science. Imprimé en 1783. (C'est la Cri

tique reprise sous œuvre et exposée analytiquement.)Et PRINCIPES métaphysiques de la science de la nature, imp. en 1786, sans compter quelques dissertations.

En 1788, Kant donna sa CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE, à laquelle se rapportent sa BASE d'une métaphysique des mœurs. Ses PRINCIPES métaphysiques de la vertu. -Et PRINCIPES métaphysiques du droit. Sa RELIGION d'accord avec la raison. Son petit Essai sur un projet de paix perpétuelle (qui a été traduit en français). IDÉE d'une histoire universelle, dans une vue cosmopolitique', et quelques autres.

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Son

En 1790 parut la CRITIQUE DU JUGEMENT, complément nécessaire des deux premières critiques, et à quoi se rapporte

Morceau que l'auteur du présent ouvrage a traduit en 1798, qui a été imprimé deux fois en français, et que le citoyen François de Neufchâteau a de même trouvé bon de recueillir parmi les pièces inédites du Conservateur, où il s'est trouvé réimprimé pour la troisième fois,

le livre intitulé: Base d'une critique du goût, publié en 1787.

Tels sont les ouvrages principaux de Kant. Il en a écrit un grand nombre d'autres. On vient de rédiger et de publier sa logique ; il a donné, l'une des années dernières-, une Anthropologie. Mais l'essentiel de sa doctrine est renfermé sur-tout dans les trois Critiques.

Kant a éprouvé, il éprouve encore de nombreuses contradictions. La satyre et l'outrage même ne l'ont point épargné 9 et s'il eut été accessible à leurs traits, le repos de ses jours eût pu en être troublé 2.

Son âge très-avancé n'a presque rien diminué de son énergie et de son activité. Il va paraître de lui une Géographie physique, rédigée et mise au jour par son ami, M. le professeur Rink, compagnon de ses travaux. Il met encore la dernière main à un ouvrage intitulé Transition de la métaphysique à la physique.

Sa doctrine a été défendue par le gouver

Les déplorables annales de l'humanité ne nous offrent que de semblables traits, et de plus révoltans encore. Dieu s'étant fait un sage trouva une croix sur la terre, et Socrate y but la ciguë. Fontenelle dit avec bien de la justesse, dans son éloge de Mallebranche: « On ferait une longue » histoire des vérités qui ont été mal re» çues chez les hommes et des mauvais » traitemens essuyés par les introducteurs » de ces malheureuses étrangères ». Il faut en convenir, l'arbre de la philosophie n'a presque porté jusqu'ici que des pommes de discorde. « C'est chose étrange, » dit Charron, « l'homme désire naturellement >> savoir la vérité, et pour y parvenir remue

nement de plusieurs pays, elle a été mal vue de presque tous; un des plus célèbres philosophes de son école a été accusé d'atheisme a perdu la chaire de philosophie qu'il occupait, etc.; et tout cela à la fin du dix-huitième siècle ! L'abbé Barruel enfin (si parva licet componere magnis) a fait de Kant un chef d'illu mine's. M. l'abbé n'est sûrement pas un de ces illuminés-là.

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