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est la garantie qui assure qu'on n'attribuera pas à ces substances de nouveaux caractères, et qu'on ne les verra pas sous de nouveaux points de vue? Il en est ainsi de tous les objets donnés immédiatement par l'expérience »>.

>> Même incertitude dans l'exposition des notions abstraites et universelles, telles que celles de substance, cause, droit, justice, etc...... Rien ne peut ici fixer la pensée, qui ajoutera sans cesse, ou retranchera, ou modifiera arbitrairement ces notions. Il faudrait, avant que de les définir, apprendre si elles sont adéquates à leurs objets, et où sont ces objets? On voit donc que de tout ce qui est donne à l'esprit, il ne saurait rien définir avec certitude. Il ne peut qu'exposer ce qu'il découvre par l'analyse, sans savoir si une analyse subséquente, si de nouvelles observations ne lui feront pas découvrir d'autres caractères, et rejeter les premiers. En un mot, il ne peut qu'analyser les objets donnés, sans être jamais rigoureusement sûr de les avoir définis ».

>> Il ne reste donc de choses aptes à une vraie définition, que celles qui ne sont pas données à l'esprit, mais qui sont engendrées et construites par lui. En pareil cas, je puis définir; car encore faut-il bien que je sache ce que j'ai voulu penser et construire. L'ouvrier qui a le

projet

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est la garantie qui assure qu'on n'attribuera pas à ces substances de nouveaux caractères, et qu'on ne les verra pas sous de nouveaux points de vue? Il en est ainsi de tous les objets donnés immédiatement par l'expérience ».

il ne

>> Même incertitude dans l'exposition des notions abstraites et universelles, telles que celles de substance, cause, droit, justice, etc...... Rien ne peut ici fixer la pensée, qui ajoutera sans cesse, ou retranchera, ou modifiera arbitrairement ces notions. Il faudrait, avant que de les définir, apprendre si elles sont adéquates à leurs objets, et où sont ces objets? On voit donc que de tout ce qui est donné à l'esprit, saurait rien définir avec certitude. Il ne peut qu'exposer ce qu'il découvre par l'analyse, sans savoir si une analyse subséquente, si de nouvelles observations ne lui feront pas découvrir d'autres caractères, et rejeter les premiers. En un mot, il ne peut qu'analyser les objets donnés, sans être jamais rigoureusement sûr de les avoir définis ».

>> Il ne reste donc de choses aptes à une vraie définition, que celles qui ne sont pas données à l'esprit, mais qui sont engendrées et construites par lui. En pareil cas, je puis définir; car encore faut-il bien que je sache ce que j'ai voulu penser et construire. L'ouvrier qui a le

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projet d'une machine, d'une horloge marine, par exemple, peut dire en quoi consiste l'idée qu'il s'en est faite, quel est son but, quelles parties entreront dans sa construction, ni plus, ni moins qu'il n'y en a ; et cependant les définitions d'idées de cette espèce, qui ne correspondent pas à un objet donné et invariable devraient plus convenablement s'appeler descriptions ».

<< Mais le champ des rigoureuses et véritables définitions, est celui des mathématiques pures. Tous les objets sur lesquels on y opère, sont construits par l'entendement, et sont tout-à-lafois donnés et invariables sous une forme sensible. Le triangle équilatéral, l'hexagone, le cube, la parabole, peuvent être définis (c'est-à-dire, décrits et détaillés d'une manière complète, definitive), parce que l'entendement qui en a projeté la conception, peut se rendre un compte entier et parfait de son opération et de son but. On voit donc par ceci : 1.o, que l'homme ne peut définir que ce qu'il a construit lui-même; qu'il n'est jamais assuré de la perfection d'une analyse que quand c'est sa propre composition qu'il décompose, et qu'il a été lui-même l'auteur de la synthèse que de toutes les autres choses, de celles qui lui ont été données, sans qu'il ait présidé à leur composition, il ne peut livrer Tome I.

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tout au plus que des expositions dont il ne saurait jamais garantir ni la certitude, ni l'intégrité. 2.° Que la seule science susceptible de définitions rigoureuses, c'est la science mathématique pure, parce que chez elle l'entendement est employé à se construire, à se façonner synthétiquement les objets dont il veut traiter; tandis que dans les autres sciences, il ne fait qu'expliquer et analyser les objets qui lui sont donnés, desquels il ne peut dire par conséquent que ce qu'il reconnaît et qu'il pense, à tort ou à raison, sans savoir si quelque jour il n'en reconnaîtra, ou n'en pensera pas des qualités différentes, et même tout opposées. >>

<< Dans les mathématiques, la chose n'est là que parce qu'elle est définie; c'est la définition qui la crée, qui la fixe: il est donc de l'essence des mathématiques pures de commencer par des définitions et de ne pouvoir marcher qu'à leur aide. Dans la philosophie au contraire, toutes les notions sont données avant leur définition et indépendamment d'elle; chaque définition n'y peut résulter que de l'analyse et de l'étude exacte d'une notion: il est donc de l'essence de la philosophie que les notions, si confuses qu'elles puissent être d'abord, leur examen et leur analyse passent en avant, et que les

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