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VIII et Louis XII conduisent leurs soldats en Italie, François 1er est vainqueur à Marignan et vaincu à Pavie, les Français sont éclairés par la vive lumière de la Renaissance italienne et, rentrés chez eux, ils vont tâcher de l'imiter. Ils essaient de comprendre quelles sont les causes de cette Renaissance, ils verront qu'elle est due en grande partie à l'étude de l'antiquité et ils étudient, eux aussi, les arts et les lettres de la Grèce et de Rome. Ainsi les guerres d'Italie furent une des grandes causes de la Renaissance en France; les Français furent inspirés par le siècle de Léon X et bientôt égalèrent leurs modèles dans toutes les branches. Ce contact des Français et des Italiens activa la Renaissance en France, mais elle eût eu lieu sans cela. La prise de Constantinople par les Turcs en 1453 avait répandu les Grecs et leur culture dans toute l'Europe, et la France eût étudié l'antiquité comme le fit plus tard l'Angleterre. L'invention de l'imprimerie, en mettant à la portée de tout le monde les chefs-d'œuvre grecs et latins, en propageant les nouvelles idées, les nouvelles découvertes, fit faire de grands progrès à l'esprit humain, et la découverte de l'Amérique, en donnant un monde nouveau à la vieille Europe, lui donna une activité, une énergie incroyable. Des milliers de navires suivirent celui de Colomb et bientôt, en présence de l'immensité du Nouveau Monde, il sembla aux hommes que rien ne leur était impossible. Les entreprises commerciales furent hardies, les choses de l'esprit le furent aussi. Le xvIe siècle fut encore le siècle de la Réforme, de la controverse religieuse; les adhérents des nouvelles doctrines attaquèrent les dogmes catholiques, furent obligés de se servir de la langue vulgaire pour exprimer

leurs arguments et firent faire de grands progrès à la prose française. Les principales causes de la Renaissance furent donc: 1° Les guerres d'Italie; 2° l'invention de l'imprimerie; 3° la découverte de l'Amérique; 4° la Réforme.

Le XVIe siècle est réellement une grande époque; c'est le siècle de Léon X, de Charles-Quint, de Henri VIII, de François Ier; c'est le siècle qui François Ier. vit l'imprimerie se perfectionner et permettre aux hommes de lire les beaux ouvrages des anciens ainsi que ceux des Marot, des Ronsard, des Rabelais et des Montaigne; c'est le siècle de Luther et de la Réforme; c'est le siècle de Raphaël et de Michel-Ange; c'est la Renaissance enfin. Regardons François Ier à sa cour. Autour de lui se trouvent Louise de Savoie, sa mère, la belle duchesse d'Étampes, Anne de Montmorency, le rude connétable, Marguerite de Valois, tendre sœur, esprit d'élite, toute une cour de belles dames, de galants chevaliers. Ce n'est plus le roi Louis XI au château de Plessis-lez-Tours, entouré de gardes et tremblant au moindre bruit, l'esprit tourmenté par les actions cruelles qu'il a dû commettre pour abattre les seigneurs féodaux. La féodalité n'existe plus; Bourbon, le dernier sire des fleurs-delys, est tombé devant Rome. François est absolu, c'est lui qui doit décider des destinées de la France. Il n'eut pas une main assez ferme pour bien mener l'état; il fut assez lâche, dans sa faiblesse, pour laisser brûler les Vaudois; mais, malgré tout, François Ier restera un grand type aux yeux de l'historien. Le vainqueur de Marignan nous frappe par sa grande mine et ses manières élégantes. Il est brave, il est éclairé, c'est l'homme de la Renaissance. Léonard de Vinci

meurt entre ses bras, et Benvenuto Cellini, le célèbre artiste, parle de lui dans ses mémoires avec le plus grand enthousiasme. L'homme d'état fut petit, bien inférieur à ses rivaux, Charles d'Autriche et Henri Tudor; le général fut imprévoyant et souvent malheureux; le roi ne sut pas empêcher les persécutions iniques; l'homme lui-même, fut quelquefois déloyal, mais cependant, de même que le Corpus Juris civilis de Justinien a suffi pour immortaliser cet empereur d'Orient, la protection accordée aux arts, aux sciences et aux lettres rachète bien des fautes du roi de France du XVIe siècle.

Marot et son Ecole.

CHAPITRE II

LA POÉSIE

Au XVe siècle nous avons vu la poésie française arriver à un haut degré de perfection avec Charles d'Orléans et Villon. Tendre et douce chez le prince, énergique et spirituelle, mélancolique parfois, chez le vagabond, il semblerait que la poésie dût continuer à fleurir après ces deux poètes, mais nous ne rencontrons pendant quelque temps que des rhétoriqueurs, des Meschinot, des Cretin, des Molinet, auteurs infimes grandement admirés des contemporains. Un nom important se présente avant celui de Marot, c'est Jean

Le Maire

de Belges. Le Maire de Belges. Quoique rhétoriqueur, comme son oncle Molinet, il exerça une grande influence sur Ronsard et Marot. Malgré un étalage d'érudition, et un abus du genre allégorique il est

parfois un poète charmant, et sa prose est aussi poétique. Né dans le Hainaut en 1473 il vécut longtemps à la cour de Marguerite d'Autriche, tante de Charles-Quint, puis fut attiré en France par Louis XII, dont il fut l'historiographe. Ses poèmes, les "Épîtres de l'Amant Vert" et son épopée en prose, les" Illustrations des Gaules," se recommandent par la forme.

Octavien de Saint-Gelais est plutôt connu comme père de Melin que comme poète, et Jean Marot aussi fut éclipsé par son fils Clément. Jean Marot, cependant, mérite d'être connu; il a de l'invention et son style est simple et gracieux.

Jehan de Pontalais, célèbre bateleur, est l'auteur d'une satire remarquable, les "Contredicts de SongeCreux."

Clément Marot, favori de François Ier et de sa sœur Marguerite, nous transporte en pleine Renaissance, à la brillante cour du roi chevalier. Il Clément naquit à Cahors en 1497, puis fut conduit Marot. à Paris par son père pour y compléter son éducation. Il s'engagea d'abord chez un procureur et fut un des clercs de la Basoche. Il fut ensuite présenté à François Ier, qui le mit au service de sa sœur Marguerite. Il suivit, cependant, François en Italie et fut blessé et fait prisonnier à Pavie. De retour en France il fut accusé d'hérésie et emprisonné au Châtelet en 1526. Il a décrit sa prison dans ce charmant poème, "l'Enfer." Le roi le fit mettre en liberté, et touché par une épître du poète, le protégea encore quelque temps après en le libérant de prison une seconde fois. Les persécutions religieuses qui commençaient déjà, et qui étaient l'avant-coureur des terribles guerres

entre huguenots et catholiques, devaient encore atteindre Marot et il fut obligé de s'enfuir de la cour de France. Il se réfugia d'abord chez Marguerite de Navarre, puis chez Renée de Ferrare, cette aimable fille du bon Louis XII. Il passa ensuite à Venise, puis ayant abjuré l'hérésie, il rentra en France en 1536.

Le talent du poète s'était mûri dans le malheur, et de 1536 à 1543 il produit ses rondeaux et ses ballades, poésies gracieuses et fines, ses charmantes épîtres, ses spirituelles et mordantes épigrammes. Nous aimons à nous figurer Marot à côté de Marguerite, lui lisant ses vers amoureux et écoutant ceux de la reine, racontant des contes avec Bonaventure Despériers et jouissant des joyeux récits de l'Heptameron. Marot, pénétré de l'esprit gaulois, crée le style marotique, admire Villon et publie une édition des œuvres du plus grand poète du moyen âge. A la cour de Marguerite, écrivant et lisant avec la reine, il a dû se rappeler Villon à Blois à la cour du vieux Charles d'Orléans, Villon fugitif et menant une vie errante. Tel avait été le sort de Marot, seulement le poète du xve siècle souffrait de son inconduite, de ses propres erreurs, le poète du XVIe siècle fut victime de l'intolérance de son siècle. Ayant traduit les cinquante premiers Psaumes, à la demande du roi lui-même, les fureurs religieuses se déchaînèrent contre lui de telle sorte que le roi ne le protégea plus, et Marot dut quitter le royaume une seconde fois. Il se retira à Genève, en fut chassé et alla mourir à Turin en 1544.

Marot continua l'œuvre des trouvères, et ses premiers ouvrages, "l'Adolescence Clémentine," son

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