Page images
PDF
EPUB
[graphic][merged small][subsumed][merged small]

commerce, aux idées, ce pays jadis impénétrable, et dont, en quelques années, l'esprit fut comme transformé. Les belles routes du Simplon, du mont Cenis, du mont Genèvre, de Tarare, de Metz à Mayence étaient achevées. Des monuments glorieux ou utiles décoraient les grandes cités : à Paris, la Madeleine, l'arc de l'Étoile, le plus colossal qui existe au monde, l'arc de triomphe du Carrousel, la colonne de la place Vendôme; à Lyon, la place Bellecour; à Bordeaux, le plus beau pont de France; à Milan, l'arc de la Paix, etc. Il achevait le Panthéon ou Sainte-Geneviève, le Louvre, qu'il voulait réunir aux Tuileries par le nord, comme Louis XIV l'avait

Arc de triomphe du Carrousel.

réuni par le midi; il réparait Saint-Denis, projetait la Bourse, construisait les abattoirs, le grenier d'abondance, afin que Paris eut toujours un approvisionnement de farine pour quarante-deux jours, etc.

[graphic]

Industrie et commerce. - L'industrie recevait les plus énergiques encouragements; il promettait de magnifiques récompenses aux inventeurs qui doteraient le travail national d'un secret enlevé à l'industrie étrangère. Il assurait un million à celui qui trouverait une machine à filer le lin. Il en promettait un autre au savant qui remplacerait le sucre de canne par le sucre de betterave; il pensionnait Jacquart pour l'invention du métier à tisser la soie qui porte son nom et créait une école d'arts et métiers à Compiègne. Il n'y avait eu que 210 exposants à l'exposition de 1798, il y en eut 1422 à celle de 1806, et l'on eût pu répéter alors avec plus de vérité les paroles du ministre à l'ouverture de l'exposition de 1795: « C'est une première campagne contre l'Angleterre. Nos manufactures sont les arsenaux d'où doivent sortir les armes les plus funestes à la puissance britannique. »

Le commerce par mer était nul, mais le commerce par terre était immense. Nos soieries sans rivales, nos draps qui ne redoutaient nulle concurrence depuis que les laines d'Espagne

[graphic][merged small][merged small][subsumed]

nous arrivaient, au lieu de passer en Angleterre, nos fers qui se perfectionnaient, nos toiles, nos linons, et jusqu'à quelques cotonnades, trouvaient des débouchés sur tout le continent.

Lettres et arts.- La gloire des lettres ne manquait pas à ce grand règne; mais les principaux écrivains étaient dans l'opposition Chateaubriand, Mme de Staël, Cabanis, Maine de Biran, Chénier, Ducis, Bernardin de Saint-Pierre, de Maistre, de Bonald, Destutt de Tracy, même Delille, même Fontanes, l'orateur officiel de l'empire, mais celui-là avec la prudente réserve du silence public 1.

Les arts jetaient un vif éclat. David leur avait donné une violente secousse pour les tirer des fadeurs énervantes du dix-huitième siècle. Il avait ramené l'école française à l'étude féconde de l'antique. Si ses élèves, en exagérant les défauts du maitre, peignaient comme ils auraient sculpté et donnaient à leurs figures, à leurs draperies la roideur du costume militaire, quelques-uns, Gros en tête, commençaient à réagir contre cette peinture académique et froide, en unissant le culte de la nature à celui des règles. Les Pestiférés de Jaffa parurent à l'exposition de 1806. Guérin, Gérard, Girodet, Prudhon étaient, après David et Gros, les peintres les plus célèbres de ce temps; Greuze était mort en 1805. Les sciences, avec Laplace, Lagrange, Monge, Haüy, Fourcroy, Berthollet, Georges Cuvier, Bichat, Cabanis, Geoffroy Saint-Hilaire, Gay-Lussac, Al. Brongniart, Thénard, etc., prenaient le merveilleux essor qui leur ont fait accomplir, depuis 70 ans, tant de prodiges. Cette époque est leur siècle de Louis XIV, mais Napoléon qui garda sur le trône son titre de membre de l'Institut, traitait mieux les savants que le grand roi ne traitait les poëtes. Il fut vraiment

1. Voyez ses Odes sur la mort du duc d'Enghien et l'enlèvement du pape. 2. Voici le titre et la date des principaux ouvrages de ces écrivains : Chateaubriand, Génie du Christianisme, 1802; les Martyrs, 1809; Mme de Staël, Delphine, 1802; Corinne, 1805; l'Allemagne, 1813; Marie-Joseph Chénier et Ducis avaient donné avant 1800 leurs principales tragédies et n'écrivaient plus guère pour le public; de Maistre, Considérations sur la France, 1799; le Pape, 1809; de Bonald, Législation primitive, 1802; Destutt de Tracy, Idéologie, 1801; Cabanis, Rapport du physique et du moral, 1802; Maine de Biran, Mémoires sur l'influence de l'habitude, 1802; Décomposition de la pensée, 1805. Pour les sciences: Laplace publie, en 1796, son Exposition du système du monde et sa Mécanique céleste, de 1795 à 1815; Lagrange, Mécanique analytigue, 1787-1811; Monge, Géométrie descriptive, 1795 et 1813; Haüy, Traite de minéralogie, 1801; Bichat, Recherches physiologiques sur la vie et la mort, 1800; Georges Cuvier, Leçons d'anatomie comparée, 1799-1805; Delambre, Base du système métrique, 1810; Traité d'astronomie, 1814; Fourcroy, Philosophie chimique, 1792 et 1806; Système des connaissances chimiques, 1801; Berthollet, Statique chimique, 1804; GayLussac, Recherches physico-chimiques, 1811; Brongniart et Cuvier, Géogra

l'ami de quelques-uns. Apprenant un jour que Berthollet était embarrassé dans ses affaires : « J'ai toujours, dit-il, cent mille francs au service de mes amis. >>

[ocr errors]

CHAPITRE LXV.

L'EMPIRE DE 1807 A 1812.

Royaumes feudataires.

On a vu déjà que l'empereur avait voulu se créer des appuis en entourant l'empire de royaumes feudataires. Le royaume de Naples, entre les mains de Joseph, et celui d'Italie, qui avait pour vice-roi Eugène Beauharnais, couvraient la France au sud-est; la Confédération helvétique, dont Napoléon était médiateur, la Confédération du Rhin, dont il était protecteur, la couvraient à l'est; le royaume de Hollande, entre les mains de Louis Bonaparte, en défendait les approches au nord-est. De ce côté, Napoléon venait de créer encore pour son quatrième frère Jérôme, le royaume de Westphalie. Le temps n'avait pas donné à ces établissements nouveaux la force qu'il assure aux institutions humaines qui vont dans le sens du siècle, ni scellé l'alliance de ces rois parvenus avec leurs peuples; mais nul ne dispose du temps; il fallait attendre que ces jeunes dynasties, si elles le pouvaient, poussassent des racines dans le sol nouveau qui les portait. Ainsi tout le long des frontières orientales de son empire, des précautions étaient prises; au sud, Napoléon n'avait rien sur quoi il pût compter. Une branche dégénérée de la maison de Bourbon régnait à Madrid sous la direction d'un

phie minéralogique des environs de Paris, etc. Les principales toiles de David sont les Horaces, l'Enlèvement des Sabines, le Serment du jeu de paume. la Mort de Marat, la Mort de Socrate, le Couronnement de l'Empereur: Gros a donné les Batailles d'Aboukir et d'Eylau, François Ier et Charles-Quint à Saint-Denis, et sous la Restauration, a peint la coupole du Panthéon; Guérin: Phède et Hippolyte, Énée et Didon, Agamemnon et Clytemnestre: Gérard Belisaire, Psyche et l'Amour, la Bataille d'Austerlitz, Ossian, et plus tard l'Entrée de Henri IV à Paris, Corinne au cap Misène: Girodet: Endymion, Hippocrate refusant les présents d'Artaxercès, une Scène du Déluge. les Funérailles d'Atala, la Révolte du Caire; Prudhon: le Crime poursuivi par la Justice et la Vengeance célestes.

[ocr errors]
« PreviousContinue »