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eft prefque fans bornes, & que chacun en particulier pourroit avoir fon Chimifte.

Après l'impreffion de ce Livre, M. Lemery commença à se reffentir beaucoup des infirmités de l'âge. Il eut quel ques attaques d'Apoplexie, aufquelles fuccéda une Paralifie d'un côté, quí ne l'empêchoit pourtant pas de fortir. Il venoit toujours à l'Académie, pour laquelle il avoit pris cet amour qu'elle ne manque guére d'infpirer, & il y rempliffoit fes fonctions au-delà de ce que fa fanté fembloit permettre. Mais enfin il fallut qu'il renonçât aux Affemblées, & fe renfermât chés lui. Il fe démit de fa place de Penfionnaire, qui fut donnée à l'aîné de deux Fils qu'il avoit dans la Compagnie. Il fut frappé d'une derniere attaque d'Apoplexie qui dura fix à fept jours, & mourut le 19 Juin 1715.

Prefque toute l'Europe a appris de lui la Chimie, & la plupart des grands Chimiftes, François ou Etrangers, lui ont rendu hommage de leur favoir. C'étoit un homme d'un travail continu; il ne connoiffoit que la Chambre de fes Malades, fon Cabinet, son Labo,

ratoire, l'Académie; & il a bien fais voir que qui ne perd point de temps, en a beaucoup. Il étoit bon ami; il a toujours vécu avec M. Regis dans une liaison étroite qui n'a fouffert nulle altération; la même probité & la mê, me fimplicité de moeurs les unifsoit. Nous fommes prefque las de relever ce mérite dans ceux dont nous avons à parler. C'eft une louange qui appar tient affés généralement à cette espéce particuliere & peu nombreuse de Gens que le commerce des Sciences éloigne de celui des Hommes.

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ELOGE

DE MONSIEUR

HOMBERG.

UILLAUME HOMBERG nâquit

Gle, Janvier 1652à Batavia, dans

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l'Ile de Java. Jean Homberg fon pere étoit un Gentilhomme Saxon, originaire de Quedlimbourg, qui dès fa jeuneffe avoit été dépouillé de tout fon bien par la guerre des Suédois en Allemagne. Quelques-uns de fes parens avoient eu foin de fon éducation. Ce qu'il apprit de Mathématiques le mit en état d'aller chercher fortune au fervice de la Compagnie Hollandoife des Indes Orientales, qui par un commerce guerrier s'eft fait un Empire à l'extrémité de l'Orient. Il eut le commandement de l'Arfenal de Batavia, & fe mafia avec la Veuve d'un Oficier, nommée Barbe Van-Hedemard. De quatre enfans qui vinrent de ce

Mariage, M, Homberg fut le fecond. Son pere, pour l'avancer dans le Service, le fit Caporal d'une Compagnie dès l'âge de quatre ans. Il eût bien voulu auffi le mettre aux Etudes; mais les chaleurs exceffives & perpétuelles du Climat ne permettent beaucoup d'application, ni aux Enfans, ni même aux Hommes faits; ce qui ne s'accorde guére avec le profond favoir qu'on donne aux anciens Brachmanes ou Gimnofophiftes. Le corps profite à fon ordinaire de ce que perd l'efprit. M. Hom berg avoit une foeur qui fut mariée à huit ans, & mere à neuf.

Son pere quitta les Indes & le fervice de la Compagnie Hollandoife, & vint à Amfterdam, où il féjourna plufieurs années avec toute fa Famille. M. Homberg parut être dans fon véritable air natal, dès qu'il fut dans un Pays où l'on pouvoit étudier. Sa vivacité naturelle d'efprit, aidée peutêtre par celle qu'il tenoit de fa premiere Patrie, lui fit regagner bien vîte le temps perdu. Il étudia en Droit à Yene & à Leipfic, & en 1674 il fut reçu Avocat à Magdebourg. Quoiqu'il fe donnât fincerement à fa Profeffion

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fentoit qu'il y avoit quelqu'autre chose à connoître dans le Monde que des Loix arbitraires des Hommes; & le Spectacle de la Nature, toujours préfent à tous les yeux, & prefque jamais apperçu, commençoit à attirer fes regards, & à intéreffer fa curiofité. Il alloit chercher des Plantes fur les Montagnes, s'inftruifoit de leurs noms & de leurs propriétés, & la nuit il obfervoit le cours des Altres, & apprenoit les noms & la difpofition des différentes Conftellations. Il devenoit ainfi Botanifte & Aftronome par lui-même, & en quelque forte malgré lui; car il s'engageoit toujours plus qu'il ne vouloit. Il pouffa affés loin fon étude des Plantes, & dans le même temps il fe fit un Globe celefte creux en façon de grande Lanterne, où à la faveur d'une petite lumiere placée au-dedans, on voyoit les principales Etoiles fixes emportées du même mouvement dont elles paroiffent l'être dans le Ciel. Déja fe déclaroit en lui l'efprit de Méchanique, fi utile à un Phyficien, qui pour examiner la Nature a fouvent befoin de l'imiter & de la contrefaire.

Tome V.

Mm

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