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Aux flots d'une mer irritée

Notre audace a prefcrit des loix ;
t par notre génie, affervie & domptée
Thétis a confenti de confacrer nos droits.
Formons tous des nos corps des digues génére
Contre les flots impurs d'un peuple ufurpateu
Et fur fes phalanges hideufes,

Déehainons, s'il le faut, l'océan protecteur.

Peuple, naguéres fi fenfible,

Abjurez vos fombres erreurs.

Eh quoi! le trifte honneur de paraître terrible,
Vaut-il le doux talent de fubjuguer les cœurs ?
On vous aimait jadis; vous voulez qu'on vous craï
Nous ne vous craindrons pas. A de vils fentimens
N'éfperez pas qu'on nous contraigne;
Nous voulons des amis. & non pas des tyrans.

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O DE

SUR

Le Mallacre des Gardes Suiffes à Paris,
le 10 Août, 1792.

[Dédiée aux Parens de ces Martyrs de la bonne foi Helvétique.]

Héros, dont la main de la gloire
Sur le bronze inscrivit les noms !
Ouvrez le temple de mémoire
Pour recevoir des compagnons-
Et vous, honneur de l'Helvétie,
Qui venez de perdre la vie
Pour prix de votre loyauté,
Paraiffez, ombres magnanimes!
Entrez généreuses victimes
D'une fainte fidélité!

Je le fais trop.-La calomnie
Sur vous distille fes poisons,
Et les noirs ferpens de l'envie
Sifflent au feul bruit de vos noms:
Mais confolez vous! du menfonge
Dont le règne en vain se prolonge,
La vérité vous vengera,
Et bientôt perçant les ténèbres
Qui dérobent vos faits célèbres,
Son flambeau les éclairera

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Des fujets traitres & parjures
Contre un monarque infortuné,
Ofant lever leurs mains impures,
Le voulaient mort ou détrôné;
Tandis que fes amis s'étonnent,
Que fes ferviteurs l'abandonnent
En proie aux plus affreux dangers;
Soudain ce cri fe fait entendre ;
"C'est donc à nous à le défendre-
"A nous les fils des étrangers!"

Alors, d'un accord unanime,
Se lèvent nos braves foldats;
Ils volent au devant du crime,
Qui confomme ses attentats;
Ils pourraient racheter leur vie,
S'ils confentaient à l'infamie
De trahir les plus faints fermens.-
Mais une valeur véritable
Ne connait point l'art méprifable
Des honteux accommodemens.

Soudain, le fignal du carnage.
S'échappe des bouches d'airain;
Au nombre oppofant le courage,
Nos guerriers réfiftent en vain :
En vain fous leurs efforts fublimes
Tombent trois fois plus de victimes
Que Louis n'a de défenfeurs.
L'hydre de ce peuple rebelle,

A chaque bleffure nouvelle,

Groit en forces, comme en fureurs.

Enfin

Enfin, dans ce combat funefte,

Du crime contre le devoir,

Ils fuccombent.... mais il leur refte

Et l'honneur & le désespoir.
A la couronne qui chancelle
Elle périt du moins fidèle,
Cette élite d'Helvétiens!
Et quand cette antique couronne
Tombe fur les débris du trône,
Elle entraîne auffi fes foutiens.

Grand Dieu! quelle fcène infernale
Défhonore l'humanité !

Non, le barbare cannibale
N'a point tant de férocité :
Un peuple calme dans fa rage,
Affecte de prendre en ôtage
Ceux qu'il a juré d'égorger;
Et s'il défarme un triste reste
De cette garde qu'il détefte,
C'est pour l'immoler fans danger.

Bientôt fur des piques brillantes,
Il proméne au fein de Paris
Les têtes pâles et fanglantes
De nos concitoyens profcrits:
Ici, s'acharnant fur sa proie,
Il dévore en hurlant de jole
Leurs cadavres de coups percés:
Là, près des bûchers qui s'allument,
Il danfe, aux flammes qui confument
Pêle-mêle, morts et blesses.

Patrie !

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