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& des progrès des principes de la révolution Française*, & il se dèfefpère, en voyant les milliers de formes que peut prendre l'anarchie, de l'infuffifance des remèdes qu'on veut y appliquer.

Et,

* Je réfume ici en abrégé les causes & les principes de la révolution Française; je laiffe au lecteur à en faire le commentaire, & l'application à d'autres pays.

La première de toutes ces caufes a été dans l'infouciance des fouverains, & dans l'ignorance de leurs miniftres. Il est arrivé un moment, ou les Rois ont voulu jouir comme leurs fujets. Ils fe font mêlés familièrement avec eux, & ils ont commencé par là à entamer le respect qui leur était dû. Ils ont fait d'abord des conceffions inutiles de leur influence, de leurs prérogatives, ou de leur autorité. Ils n'ont combattu que faiblement des rebelles qui les attaquaient avec toute l'ardeur de la cupidité. En difputant la puissance aux Princes, ceux là semblaient combattre pour une maitrefle, tadis que ceux ci ressemblaient à de vieux époux ennuyés, qui plaident langoureusement pour la dot de leurs femmes. Les Rois pardonnaient aux Jacobins, tandis que les Jacobins ne pardonnaient point aux Rois.

D'après cette relaxation dans les clafses gouvernantes, fi l'on defcend dans les clafses gouvernées, on y voit

La philofophie répandue partout. Les philofophes liés par les mémes principes, & tendans tous au même but, l'irréligion, l'efprit de difcuffion, & le manque de refpect pour les autorités fupérieures.

Une hiérarchie philofophique, établie depuis les grands, jusqu'aux bouchers;

La confufion des rangs, & des coftumes;

L'oifiveté, la mollefse, l'immoralité des premières classes;
Le babil, fubftitué à la force;

Le

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Et, comme une paffion ne peut être détruite que par une paffion plus vive, une grande terreur que par une terreur plus grande encore, on cherchait dans l'Europe, au mois de 7bre, quel ferait le caractère ferme & févère à la fois, que l'on pourrait oppofer à l'audace & à la férocité prononcées de Danton, & l'on s'affligeait, & l'on foupirait hautement contre les fuites cruelles du luxe, & de la philofophie, & l'on croyait tout perdu ;

Et tout cela avait été l'ouvrage d'un feul mois,

LE MOIS DE SEPTEMBRE 1792.

Mais enfin M. Pitt s'expliqua, M. de Clairfayt ordonna à Royal Allemand de fabrer fans mifericorde

Le placement d'argent à ufure, & furtout en rentes viagéres; L'abandon de l'agriculture, pour le commerce, du commerce la banque, de la banque pour l'agiotage;

pour

Les emprunts publics, qui ont obéré des générations entières; Le luxe dans toutes les clafses; tous les hommes s'étant créé des befoins au dessus de leurs facultés ;

L'inquiétude pour le changement, entretenue par l'efprit marchand, qui tend à exciter fans cefse des befoins artificiels, afin d'augmenter la confommation, & la connivence des gouvernans avec les gouvernés à cet égard, afin de faire haufser les revenus publics;

La difficulté d'avoir, lorfque tout le monde lit, imprime, & raisonne, des miniftres plus habiles que ceux qui font admini TAME II,

Mm

Hrés,

corde; alors l'espérance reparut au fond de nos cœurs, & je crus, dès ce moment, pouvoir commencer Le Tableau de la Reftauration de la Monarchie Françaife, ou la Campagne de 1793.

ftrés, ce qui joint fouvent au défir de les renverfer, la faculté de s'en moquer;

Le pouvoir de l'argent, plus fort que celui de la richefse territoriale; la pré-eminence des villes fur les campagnes, & des artiftes fur les laboureurs ;

De cette immoralité, de cette irritation font nées, naifsent, & naltront toutes les revolutions préfentes, pafsées, & futures,

P. S. A la féance de la convention nationale du 22 Juillet, on propofa la dégradation civique des adminiftrateurs des départemens qui, après avoir partagé l'infurrection de la Gironde, se retractaient; Danton s'y oppofa en proférant ces terribles paroles qui font une nouvelle preuve des maffacres qu'il fit faire, & de ceux qu'il médite encore.

"Attendez que le peuple vous ait remis fa foudre dans la fédération du 10 Août; alors vous frapperez des coups plus "forts fur les adminiftrateurs qui n'en font pas moins coupables, "quoiqu'ils fe foient retractés. Vous les rendrez inhabiles à venir empoisonner la légiflature.....&c."

CON

CONCLUSION.

'AI rempli une tâche bien pénible. Il ne fal

J'A

lait rien moins que l'obligation que je m'étais impofée de retracer ces jours affreux de nos révolutions, pour furmonter le dégoût & l'horreur dont j'étais pénétré, en en tranfmettant l'hiftoire à la poftérité. Mon cœur était oppreffé, mon efprit abforbé, vingt fois la plume eft tombée de mes mains, &, en la reprenant, je n'étais encouragé que par une feule réfléxion. Peut-être, me difais-je, que les races futures, en jettant les yeux fur ce tableau de meurtres, de vols & d'affaffinats, tracé par un écri vain contemporain, par un témoin oculaire, fe tiendront en garde contre les intrigans qui, fous le mafque d'amis du peuple, l'entrainent dans tous les genres de perverfité, & le conduifent enfin à fa ruine. J'aurai du moins payé ma dette à l'humanité, fi je préserve un feul peuple, qu'on pourrait encore égarer, des maux affreux qui, depuis quatra ans, dévorent ma trifte,patrie.

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O vous, les plus coupables, fans doute, de tous ces intrigans, vous, qui aujourd'huy joignez vos plaintes à celles des malheureux qui furent vos victimes, CONSTITUTIONNELS, tour à tour imbécilles & féroces, contemplez votre ouvrage.

De quel droit ofez-vous aujourd'huy vous plaindre, fi vos propriétés ont été envahies, fi vos têtes ont été profcrites, lorfque vous avez donné vous mêmes le fignal de tous ces forfaits, par l'indifférence coupable que vous témoignâtes à l'incendie des châteaux, au pillage de l'hotel de Caftries, & à l'affaffinat de Berthier & de Foulon. Quelles pourfuites commandâtes-vous alors? N'encouragiez vous pas au contraire les brigands vos falariés, à promener par tout leurs fureurs, en leur promettant l'impunité? Eh bien! vos ftipendiés d'alors font devenus enfuite ceux de vos fucceffeurs; &, comme le caractère de la fureur eft d'aller toujours en augmentant, ainfi que la flamme va toujours en croiffant, perfonne ne peut plus affigner le terme auquel elle pourra s'arrêter. Vos pères, vos femmes, vos enfans, immolés à leur tour par les fcélérats que vous avez déchainés, maudiront ainfi que nous les auteurs de nos maux, en les dévouant à la vengeance d'un Dieu juste.

Oui, toutes les calamités, qui déchirent notre malheureuse patrie, & dont vous affectez aujourd'

huy

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