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pillait, perfonne ne rendait de compte ; & fouvent les fommes que l'on reçut de la tréforerie fervirent à difpofer une infurrection dont la crainte faifait exiger & accorder le double (on a vu depuis faire deux émeutes & un pillage, pour procurer 7 millions à cette commune infatiable.)

C'est ainsi que Paris détruifait toutes les loix, fe jouait de tous les principes de morale & de juftice, pillait les fortunes particuliéres, envahiffait la fortune publique, & recevait des adhésions de tous les brigands du Royaume, qui pratiquaient en petit les concuffions dont Paris leur donnait l'exemple.

On avait fouvent comparé la capitale à une fille entretenue, & la comparaifon était jufte, grace aux foins que le gouvernement prenait de lui procurer du pain & des fpectacles, pour l'empêcher de fe fâcher. Cette maitreffe chérie ne reffemblait plus alors qu'à une vile proftituée, qui avait ruiné, empoisonné, & congédié fon amant; elle avait commencé par être la dupe de tous les filoux conftitutionels qui l'avaient depouillée, mais au 10 Août, elle était tombée (qu'on me pardonne le terme) dans un effaim de racolleurs & de chenapans, qui s'en partageaient en jurant les impures guenilles.

Enfin la faction pour affurer l'empire à l'élite des brigands du Royaume, & éloigner fans retour ceux des députés, qui avaient montré une pudeur Feuillantine, conftitua (ce qui ne fe conftitue point) une convention nationale: elle adopta pour cela une forme incompatible avec le mot même de convention. Elle ordonna que le peuple en affemblées primaires ne pourrait nommer que des électeurs, qui éliraient enfuite des repréfentans. Elle y ajouta une indemnité à ces mêmes électeurs. C'etait faire up appel à tous les hommes turbulens, oififs, pauvres, befogneux, mendians ou fripons; c'était les inviter à aller se faire nommer dans les affemblées, furs d'être défrayés dans les orgies électorales; c'était entaffer crime fur crime, Pelion fur Offa, Offelin fur Petion, Robespierre fur Briffor. C'était éloig ner de ces affemblées tous les pères de famille, tous les propriétaires. Effectivement, ils n'y conviurent point. Le dixième de la nation tout au plus s'aflembla, & comme cette portion eft au moins celle des brigands chez une nation vieille & corrompue, la France dut s'attendre à voir venir de toutes les provinces un choix de tous fes bourreaux. Ils font venus, ils en déchirent aujourd'huy toutes les parties, ils ont porté le trouble partout, mais tant de facriléges vont enfin recevoir leur punition; leur procès ne fera pas long, leur accufation eft dans leurs procès verbaux, & leurs témoins font tous les habitans du globe.

Le

Le No. fuivant traitera de la pofition militaire de la France, aprés le 10 Août, & des affaffinats du 2 7bre. je monterai fur l'échaffaud, je defcendrai dans les carrières avec ces miférables victimes. Abforbé par la douleur depuis la mort de mon roi, étonné chaque jour des nouveaux fuccès de la faction, je m'étais laiffé affaiffer, la penfée fe refufait à ma plume. Le chant de la victoire s'eft fait entendre et m'a reveillé. Ils feront donc vengés tous nos malheurs!-YORK, COBOURG, D'AUTICHAMP, BEAULIEU, HOHENLOHE, je frémis de joie & d'éfpérance; & CLAIRFAYT! il a repris fes armes, je retrouve ma plume, & je ne la quitte plus.

Pendant qu'on imprimait cet écrit, le Journal de Briffot du 11 Mars, vient de me tomber fous le main, j'y lis,

"Les droits de l'homme ne font plus; toutes les loix natu"relles font foulées aux pieds, une nuit a renverfé l'ouvrage de quatre ans, la liberté individuelle, la liberté de la preffe. Une "faction qui veut régner au milieu des ténébres a defendu à des "deputés philofophes d'eclairer leurs concitoyens. La loi ne permet plus à Briffot de travailler à la redaction de ce Jour"nal, &c."

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C'eft une fingularité affez remarquable de voir l'homme du 10 Mars, le bavard par excellence, condamné le 10 Mars même au plus terrible fupplice pour lui, celui du filence. Pour confondre ce lâche affaffin, je lui confeille de relire fon Journal du 14 Août, dans lequel, il dit qu'il faut laiffer dormir un peu la lei. Eh bien! elle dort aujourd'huy pour toi, malheureux ! mais elle ne dormira pas toujours↓

Gorfas s'eft fauvé de l'incendie de fes preffes le même jour, un epiftolet à la main; c'était Gorfas qui avait fait brûler le 11 Août à la tête de fes ouvriers les prefses ariftocrates & feuillan

tines:

Maitre Gorfas! vous voyez qu'il eft juste
Qu'on foit puni par ou l'on a péché,

DERNIER TABLEAU DE PARIS.

Continuation du Chapitre Précédent

ου,

Hiftorique de l'Anarchie, depuis le 10 Août, jusqu'au 2 7bre, 1792.

Opérations Militaires de l'Affemblée.

Dernier Mouvement, & Fuite de M. de la FAYETTE.

L

'Affemblée était dans les plus vives inquié

tudes fur la manière dont l'armée Française apprendrait la nouvelle de l'infurrection du 10 Août, & de la déchéance du Roi. Les généraux qui fe trouvaient à la tête de cette armée, étaient prefque tous des membres de l'affemblée conftituante. Prefque tous faifaient partie de cette minorité factieuse de la nobleffe qui avait trahi fes fermens, & dont plufieurs avaient abandonné leur Roi, pour fuivre leur Due d'Orléans. Leurs aides de camp, leurs frères d'armes étaient membres du corps légiflatif; ceux-cy corroboraient leur parti TÔME II.

K

dans

dans Paris: ils les inftruifaient de tout ce qui fe paffait dans les comités infurrectionnels: Théodore Lameth, Jaucourt, Girardin, Dumas, Aubert du Bayet, d'Aveyrhoult, & quelques autres étaient les fuppléans nés des généraux la Fayette, A. Lameth, la Tour-Maubourg, &c.

Ces meffieurs n'écoutaient, ne voyaient que le grand la Fayette; c'était, à les entendre, le fils ainé de la liberté, le fléau de l'aristocratie, tout parlait de fa gloire; il n'était point dans le dictionnaire des courtifans affez d'épithétes & d'adjectifs, pour fignaler l'homme que le feu Duc de Choifeul avait nommé à la premiére vue, Gilles premier.

Les directeurs de la confpiration du 10 Août, ne pouvaient douter que déjà leurs confrères n'eufsent fait parvenir des avis certains au général la Fayette. Il fallut donc employer les dernières reffources de la tactique de la déforganisation, pour éloigner de nos troupes tous les généraux affermentés, les remplacer fans foulévement par des républicains, & changer le plan de défense qui exiftait.

Ce n'était pas un médiocre travail que de chercher à purger l'armée de cet efprit conftitutionnel qu'elle avait reçu des chefs. Les foldats, ainfi que les volontaires nationaux, trouvaient dans la ma

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