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hæc abfente Authore, atque ab exemplari, non ab eius manufcripto, typis mandata sunt, nulla diligentia potuit impedire, quin aliqui errores irrepferint, quorum præcipui fic corrigentur. »

Ce n'est pas que l'on soit sûr cependant que Descartes ait revu lui-même les épreuves de la seconde édition. Mais la chose est vraisemblable, l'impression se faisant à Amsterdam, qui n'est pas tellement éloigné (huit lieues environ) d'Endegeest, où habitait Descartes toute cette année 1642. Nous pouvons donc suivre ce texte avec pleine confiance, sans manquer d'ailleurs de signaler soigneusement toutes les variantes de la première édition. D'autres variantes encore, et parfois même des corrections heureuses, nous ont été fournies, pour le texte des cinquièmes Objections (celles de Gassend), par la Disquisitio Metaphysica de 1644; nous avons signalé chacune au passage.

L'orthographe non plus n'est pas la même dans les deux éditions de 1641 et de 1642. Nous adopterons aussi celle de Hollande en 1642. Elle présente cependant plusieurs innovations: distinction de l'i et du j (sauf cependant pour les majuscules en tête des mots, où l'on trouve presque toujours I, et le cas particulier, ajo, ajebant); distinction de u et de v, aussi bien comme lettres initiales que dans le corps des mots, etc. L'édition de 1641, au contraire, faite à Paris, est plus archaïque elle ne distingue point le j de l'i (exemple: eius, coniicere, etc.); elle imprime uniformément v pour u ou ven tête des mots (vt, vnus, etc.), et u pour v ou u dans le corps des mots (diuersus, viuunt, etc.). A cet égard, elle se rapproche certainement plus de l'orthographe de Descartes, et peut-être convenait-il de l'adopter. Toutefois, comme le texte imprimé à Paris l'a été, non sur le manuscrit du philosophe, mais sur une copie (ab exemplari, non ab eius manufcripto), et comme, d'autre part, Descartes a laissé passer dans l'édition de 1642 l'orthographe des Elzevier, et par conséquent ne l'a pas désapprouvée, nous pourrons donc la suivre sans scrupule, comme plus conforme aussi d'ailleurs à nos habitudes mo.

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dernes. Notons une particularité intéressante des cinquièmes Objections, et qui paraît propre à Gassend; car on la retrouve, non seulement dans le texte de ces Objections, imprimé en 1641 et en 1642, mais dans la Disquisitio Metaphysica de 1644, et en général dans toutes les œuvres de ce philosophe (GASSENDI Opera, édition de 1658). Presque toujours, ei est mis pour e dans les mots omneis, plureis, etc., et même aussi pour i dans heic, heinc, etc. Nous reproduirons cette particularité.

Une difficulté nous a quelque temps arrêtés. Le texte latin des Méditations est imprimé, soit en 1641, soit en 1642, tout d'une venue, presque sans mettre à la ligne, ce qui en rend la lecture assez fatigante. Sans doute on a l'impression en quelque sorte matérielle d'un raisonnement qui se tient d'un bout à l'autre, et qui forme un tout compact et comme un bloc. Toutefois le raisonnement de Descartes a bien aussi quelque souplesse et comme des articulations: il ressemble à un organisme qui se développe, ou bien à un corps de troupe en marche, avec ses compagnies et ses escouades qui se succèdent à des intervalles réguliers. C'est pourquoi les anciens éditeurs, au moins pour la traduction française, n'ont pas craint de mettre à la ligne aussi souvent que la chose leur a paru possible. Nous avons fait de même, avec d'autant moins de scrupule qu'une étude attentive du texte de Descartes fournit, ce semble, quelques indications à ce sujet, et qu'en découpant par tranches, autant que possible en habile cuisinier, comme disait Platon, la pensée du philosophe, nous n'avons point cru trahir ses intentions, mais, au contraire, les respecter et les suivre plus fidèlement.

En effet, la sixième Méditation et déjà même la cinquième ne ressemblent point en cela aux quatre qui précèdent, comme si les éditeurs s'étaient lassés eux-mêmes de ces longues phrases mises bout à bout interminablement, sans un repos au moins pour les yeux, ni un arrêt pour l'attention du lecteur. Exactement, les deux premières éditions commencent à diviser le

texte des alinéas, p. 68 du présent volume, 1. 20. Le texte de la sixième Méditation est mis jusqu'à dix-neuf fois à la ligne (2e édition), et même vingt-neuf fois (1o édition), ce qui est peut-être excessif; et le texte de la cinquième, quatre fois déjà, ce qui n'est pas assez. N'est-ce pas là un exemple à suivre pour imprimer de même le texte des Méditations I, II, III et IV, bien que, ni en 1642 ni en 1641, il ne soit pas une seule fois mis à la ligne?

Mais Descartes l'a-t-il ainsi voulu? Ou bien n'est-ce pas la faute de ses éditeurs, qui n'auraient pas compris ses indications? Dans les autographes que nous avons de lui, il ne met pas souvent à la ligne, il est vrai; mais, de temps en temps, après un point, la phrase suivante, au lieu de reprendre immédiatement, laisse un petit intervalle en blanc, très distinct, et qui, remarquons-le, ne se retrouve pas devant toutes les phrases, mais devant celles qui passent à un autre ordre d'idées. Ce petit intervalle en blanc correspond donc bien à une mise à la ligne, et c'est être fidèle à Descartes, ce semble, que de l'interpréter ainsi typographiquement, comme nous avons fait à maintes reprises dans les cinq volumes de la Correspondance. Au contraire, n'en pas tenir compte, et passer pardessus ce petit intervalle en le négligeant, serait établir un pont où il y a un fossé, et rattacher indûment à ce qui précède un développement nouveau que le philosophe a voulu manifestement en détacher. Que le manuscrit des Méditations ait présenté cette particularité, on n'en peut rien savoir, et on doit même en douter, puisque ce n'était pas un autographe de Descartes, mais une copie, avons-nous vu plus haut, ab exemplari, non ab eius manuscripto; à moins que la copie, chose improbable, n'ait reproduit, comme au décalque, les moindres particularités de l'original. Toutefois, au moins dans l'édition de 1642, on remarque assez souvent, à la fin des phrases, de petits intervalles en blanc. On n'oserait dire que c'est par conformité avec le manuscrit, surtout si l'on n'est pas sûr que celui-ci donnât de telles indications. Peut-être ce sont de

simples négligences du typographe, d'autant plus que ces intervalles correspondent bien quelquefois, mais non pas toujours, à des changements d'idées. Alors le doute même peut s'interpréter en notre faveur, et nous ne voyons pas pourquoi nous aurions le respect superstitieux d'une disposition typographique, dont on ne peut même pas dire que les éditeurs eux-mêmes ont gardé l'observance (au moins dans les Méditations V et VI), et qu'on n'a d'ailleurs point de raison d'attribuer à Descartes, mais plutôt le contraire.

On pourra cependant objecter que, si Descartes avait voulu qu'on mît davantage à la ligne, il aurait corrigé en ce sens l'édition de 1642, imprimée si près de lui, à Amsterdam. Mais d'abord il est possible, il est même probable, que cette édition ait été faite, non pas sur un nouveau manuscrit, qu'on n'aura pas pris la peine de recopier pour cela, mais sur l'édition de 1641, dont on aura sacrifié un exemplaire: on en aura donc suivi le plus souvent les divisions. Ensuite, il n'est pas absolument certain que Descartes ait revu toutes les épreuves, surtout à ce point de vue: on n'attachait pas, au xvire siècle, la même importance que nous à une disposition purement typographique, et il se peut fort bien que le philosophe, tout entier à l'ordre logique, ait négligé de rectifier celle qu'avait suivie l'imprimeur, pure question de forme, après tout, assez indifférente à qui est principalement attentif au fond. Aucune conséquence donc, aucune obligation à tirer de là, et nous retrouvons toujours à cet égard notre pleine et entière liberté.

Nous en avons usé pour le mieux. Nous avons donc mis, sans hésiter, à la ligne, chaque fois que le sens a paru, non seulement nous y autoriser, mais l'exiger. Or le raisonnement de Descartes est tellement net, que bien peu de chances d'erreur en cela sont laissées à une interprétation attentive: c'est presque à coup sûr qu'on peut mettre le doigt au point précis où une argumentation finit, où commence une autre argumentation. Nous avons découpé le texte de chaque Méditation en autant d'alinéas que nous l'avons jugé nécessaire, pour la

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commodité de la lecture et pour l'intelligence plus aisée du développement métaphysique. Aussi bien le lecteur pourra toujours reconstituer le texte tel qu'il a été imprimé d'abord, dans sa continuité trop absolue des notes indiquent les endroits où notre édition met seule à la ligne, tandis que celle de 1641 ou de 1642 n'y met pas. Mais nous sommes persuadés que nous n'avons été infidèles à la lettre, sur ce point, et encore en apparence, que pour rester plus fidèles à l'esprit de Descartes, et peut-être même à son texte, si nous l'avions écrit de sa main, et avec tout ce qu'il a pu y mettre d'indications.

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