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l'Univers, quelle conclusion faut-il tirer? - Nous en tirons cette conclusion que M. l'évêque d'Orléans eût mieux fait de réfuter l'Univers que de l'interdire. Cela eût été plus conforme à ce précepte de Jésus-Christ :

« SI J'AI MAL PARLÉ, RÉPONDEZ-MOI; SI J'AI BIEN PARLÉ, POURQUOI ME FRAPPEZ-VOUS? »

Toute la loi de la liberté de la presse est dans cet admirable précepte.

Liberté pour tous!

LIBERTÉ pour l'Univers DE TOUT DIRE, puisque M. l'évêque d'Orléans a la LIBERTÉ DE TOUT CONTREdire.

Ce principe s'applique à tout, et en toutes circonstances sa supériorité se manifeste sur le principe contraire.

II.

13 juin 1852.

L'Univers prend parti pour le Peuple fribourgeois contre le Gouvernement cantonal, pour la Souveraineté contre le Pouvoir; il est vrai qu'à Fribourg, derrière le peuple, il y a les jésuites. Peu nous importe, à nous, quelle forme et quelle couleur de robe porte la liberté, si elle est coiffée d'un bonnet phrygien ou d'une calotte! Est-elle, oui cu non, la liberté mutuelle ? — Cela nous suffit ; qu'elle passe! Liberté en tout et partout, pour tous et contre tous.

III.

30 août 1852.

L'Univers dit, en parlant d'un ouvrage de M. Nicolas, intitulé: Du protestantisme et de toutes les hérésies dans leur rapport avec le socialisme, précédé de l'examen d'un écrit de M. Guizot :

« L'écrit de M Guizot dont il est ici question est la préface des Médi

tations et Études morales, dans laquelle l'éminent historien, préoccupé du péril de la société, invite tous les chrétiens, catholiques et protestants, à réunir tous leurs efforts contre les erreurs dont l'ensemble forme la grande hérésie politique et religieuse connue aujourd'hui sous le nom de socia lisme. Mais M. Guizot peut prendre avec sa foi des libertés que nous ne saurions nous permettre avec la nôtre, et l'accord, ou pour mieux dire la fusion qu'il propose aux catholiques, loin d'opposer une barrière aux erreurs qui l'épouvantent, ne ferait que leur ouvrir entièrement le chemin. >>

Ces réflexions de M. Veuillot sont suivies de cette citation de M. Nicolas :

« Le socialisme n'est que le protestantisme contre la société, comme le protestantisme n'est que le socialisme contre l'Eglise.

» M. Guizot dit, avec un grand sens, que ce n'est que par la soumission à l'ordre surnaturel que la société pourra être refaite. C'est là une de ces hautes et simples vérités dont la profession fait d'autant plus honneur à l'âme et au caractère de M. Guizot qu'il les proclame au péril de la logique de sa doctrine.

>> Le protestantisme, en effet, n'est que l'insoumission à l'ordre surnaturel, puisqu'il en fait dépendre la notion de cette raison humaine qui doit s'y soumettre; il en est, par suite, la négation; et il devait aboutir au naturalisme, qui est un des deux grands affluents du socialisme. L'exposition de cette vérité fait l'objet de la première partie de mon travail. Mais il ne dépend pas de l'homme de se soustraire à l'ordre surnaturel et de le supprimer. Cet ordre existe; quoi qu'il fasse, il en est enveoppé, il le porte au dedans de lui-même, il le respire, il s'y meut, il en vit; en le niant, il ne peut faire qu'une chose : c'est d'en pervertir le rapport avec sa nature, et, pour se refuser à correspondre avec lui par le christianisme, qui en a seul le secret, d'y être précipité par le panthéisme et le fatalisme; le panthéisme, qui est le second affluent du socialisme, et qui a été le premier comme il est le dernier mot du protestantisme.

» En cela même j'ai été amené à reconnaître et à montrer que le protestantisme comme hérésie, et par conséquent toute héresie, était voué, dès sa naissance et par sa naissance même, au PANTHÉISME et par conséquent au COMMUNISME, qui n'est qu'un panthéisme social, comme le panthéisme n'est qu'un communisme religieux; ce que j'ai démontré en fait par l'examen des principales hérésies qui ont paru dans le monde, et ce qui s'explique théoriquement de la manière la plus admirable par cette glorieuse prérogative de la foi catholique d'être la seule voie de communiation avec l'infini, le seul pont jeté sur l'abîme. »

Voilà donc M. Guizot accusé et convaincu de panthéisme; que disons-nous ?-De socialisme; que disons-nous encore? -De communisme.

Que répondra-t-il ? Que pourra-t-il répondre? Qui prétend limiter aux autres leur part de liberté ne saurait se plaindre que les autres lui limitent la sienne. Sous le régime où chacun se croit infaillible et s'érige en pape, chacun s'expose au risque d'être excommunié par un. pape rival, usant du même droit d'infaillibilité.

LA BOURGEOISIE.

I.

18 avril 1852.

Après avoir déclaré que la Bourgeoisie a cessé d'exister politiquement, le Pays cherche à la ramener en mème temps qu'il constate que « le suffrage universel a eu pour >> but de replacer la société tout entière dans ses conditions » d'unité originelles. » Si la Bourgeoisie n'existe plus, pourquoi donc le Pays s'adresse-t-il à elle ? C'est demander son chemin en frappant à la porte d'une maison déserte, c'est perdre son temps. Oui, en effet, devant le suffrage universel, ce précurseur de l'impôt unique, il n'y a plus, en France, de Bourgeoisie, il n'y a plus que des Français : les uns majeurs, les autres mineurs; il n'y a plus que des consommateurs : les uns oisifs, les autres travailleurs. Diminuer le nombre de ceux qui consomment sans produire, et augmenter le nombre de ceux qui produisent en consommant trop peu : voilà ce que fera tôt ou tard le suffrage universel, et en quoi il est le point de départ d'une politique nouvelle ! Le grain est semé, il n'y a plus qu'à attendre la récolté.

Le Pays, qui place si haut le suffrage universel, n'oublie qu'un petit détail, c'est qu'il a défendu contre la Presse, et à plusieurs reprises, le maintien de la loi du 31 mai, qui

avait substitué au suffrage universel le suffrage restreint. De tous les journaux existants, la Presse est le seul qui ait constamment protesté contre le suffrage restreint et constamment maintenu le suffrage universel à la hauteur où il a été replacé après le 2 décembre 1851.

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Le Siècle se constitue le défenseur de la Bourgeoisie. Sous le régime de l'égalité devant la loi civile et politique, devant le jury électif et devant l'urne électorale, que veut dire ce mot La Bourgeoisie? Il n'y a plus en France que des administrateurs et des administrés, des électeurs et des élus, des riches et des pauvres, des oisifs et des travailleurs. Toute autre dénomination est fausse. Sans la fortune, que devient la noblesse ? Sans l'ordre, que devient la fortune?

III.

2 août 1852.

La discussion sur la Bourgeoisie entamée entre le Siècle et l'Assemblée nationale, discussion dans laquelle sont in tervenus le Pays et la Gazette de France, se poursuit sans avancer et sans conclure.

Cela devait être.

La Bourgeoisie, comme la Noblesse, n'existe plus, en France, qu'à l'état de parti déchu : l'une représentant le privilége du suffrage, le droit d'aînesse électoral; l'autre le privilége de la naissance, le droit d'aînesse patrimonial. La Bourgeoisie, c'était le cens électoral, c'était le droit de suffrage à l'état de privilége.

La Bourgeoisie est morte, en France, le jour où le suffrage universel y est né; elle est morte comme y mourut, il y a

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