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était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle sera, dans ce cas, appliquée aux supérieurs qui auront donné l'ordre.

» Article 115. Si c'est un ministre qui a ordonné ou fait les actes ou l'un des actes mentionnés en l'article précédent, et si, après les invitations mentionnées dans les articles 63 et 67 du sénatus-consulte du 21 floréal an XII, il a refusé ou négligé de faire réparer ces actes dans les délais fixés par ledit acte, il sera puni du bannissement.

>> Aricle 116. Si les ministres prévenus... prétendent que la signature à eux imputée leur a été surprise, ils seront tenus, en faisant casser l'acte, de dénoncer celui qu'ils déclareront auteur de la surprise, sinon ils seront poursuivis personnellement.

» Article 117. Les dommages-intérêts qui pourraient être prononcés à raison des attentats exprimés dans l'article 114 seront demandés, soit sur la poursuite criminelle, soit par la voie civile, et seront réglés eu égard aux personnes, aux circonstances et au préjudice souffert, sans qu'en aucun cas, et quel que soit l'individu lésé, lesdits dommages-intérêts puissent être au-dessous de vingt-cinq francs pour chaque jour de détention illégale et arbitraire, et pour chaque individu.

» Article 184. Tout fonctionnaire de l'ordre administratif ou judiciaire, tout officier de justice ou de police, tout commandant ou agent de la force publique, qui, agissant en sadite qualité, se sera introduit dans le domicile d'un citoyen contre le gré de celui-ci, hors les cas prévus par la loi et sans les formalités qu'elle a prescrites, sera puni d'un emprisonnement de six jours à un an et d'une amende de seize francs à cinq cents francs, sans préjudice du second paragraphe de l'art. 114.

» Article 341. Seront punis de la peine des travaux forcés à temps ceux qui, sans ordre des autorités constituées et hors le cas où la loi ordonne de saisir des prévenus, auront arrêté, détenu ou séquestré des personnes quelconques. Quiconque aura prêté un lieu pour exécuter la détention ou la séquestration subira la même peine.

» Article 342. Si la détention ou séquestration a duré plus d'un mois, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité. »

On le voit, le code d'instruction criminelle et le code pénal sont formels. Nul ne peut être arrêté à son domicile sans que l'acte qui ordonne l'arrestation exprime formellement le motif de l'arrestation et la loi en exécution de laquelle elle est ordonnée, SANS QUE CET ACTE SOIT NOTIFIÉ A LA PERSONNE ARRÊTÉE, ET SAns qu'il lui en sOIT LAISSÉ COPIE. Donc, toute personne arrêtée à son domicile, envers laquelle ces formalités légales n'ont pas été observées, est dans le cas de légitime défense. Ce mot comprend et justifie tout.

A tout acte arbitraire, la résistance légale n'est pas seulement un droit, elle est un devoir.

Elle est un devoir puisque tant de garanties écrites dans la Constitution, dans le Code d'instruction criminelle et même dans le Code pénal, restent impuissantes à protéger la liberté des individus contre l'arbitraire de la police et la négligence de la magistrature, négligence authentiquement attestée et sévèrement blâmée par un chef de la justice, par un garde-des-sceaux, par M. de Serre.

C'est déjà exorbitant d'être exposé à être arrêté et conduit en prison lorsqu'on est certain de n'avoir donné lieu à cette rigueur préventive par aucun acte punissable; mais si l'on doit être conduit en prison, encore faut-il ne s'y laisser mettre que parfaitement en règle, et sauf le recours ultérieur aux articles 114, 115, 116, 117, 184, 341 et 342 du code pénal.

A la loi opposons la loi!

LE CANDIDAT DU SUFFRAGE RESTREINT.

14 septembre 1851.

La candidature du prince de Joinville n'a pas de plus mortels ennemis que ses promoteurs plus ou moins ardents, car l'Ordre, le Messager de l'Assemblée et le Journal des Débats sont tous les trois pour le suffrage restreint contre le suffrage universel.

Le prince de Joinville candidat du suffrage restreint! En vérité, c'est faire la partie trop belle à l'Élu du 10 décembre, qui, pour obtenir la révision de la Constitution et devenir éligible, n'a qu'à proposer l'abrogation de la loi du 31 mai!

O Politique, ne serais-tu donc qu'un tissu d'inconséquences?

1851.

LA LIBERTÉ SAGE.

L'égoïsme et la PEUR sont les passions de l'époque. Mais il aura un lendemain dont l'aurore sera aussi éclatante que le crépuscule en aura été sombre et nebuleux.

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L.-N. BONAPARTE. 7 janvier 1834.

I.

16 septembre 1851.

L'Evènement a comparu ce jour 15 septembre 1851 devant la cour d'assises de la Seine, présidée par M. Perrot de Chezelles.

L'Événement a été suspendu.

Le gérant du journal, M. Paul Meurice, a été condamné à neuf mois de prison et 3,000 francs d'amende.

L'auteur de l'article, M. François-Victor Hugo, a été condamné à deux mille francs d'amende et neuf mois de pri

son.

M. Victor Hugo n'a que deux fils; la justice les lui aura pris tous les deux; l'aîné aura devancé d'un mois son frère à la prison de la Conciergerie; ils ont eu le même berceau, ils partageront le même cachot.

M. Paul Meurice ira rejoindre M. Paradis.

L'Événement va donc avoir en prison quatre de ses rédac

teurs!

Où s'arrêtera-t-on dans cette voie?

On ne s'arrêtera pas.
On ne peut pas s'arrêter.
La Réforme a été frappée,
Le Peuple a été frappé,

Le Vote universel a été frappé,
La Presse a été frappée,

Le Siècle a été frappé,

La République a été frappée,

Le Charivari a été frappé,

Le Messager de l'Assemblée a été frappé,
L'Opinion publique a été frappée,

L'Assemblée nationale n'a échappé à une condamnation qu'en baissant la tête.

Successivement viendra le tour du National, de l'Ordre, de la Gazette de France, du Journal des Débats et de l'Union.

Quoique glorifié par le ministère public, le Constitutionnel s'abuserait étrangement s'il se berçait dans l'espérance d'échapper aux coups de la Compression.

La compression est un boulet qui roule sur un plan incliné.

Ce ne sont pas des journaux qu'on poursuit; ce qu'on poursuit, c'est la liberté de la presse.

Les journaux qui applaudissent ou qui se taisent s'en apercevront lorsqu'il ne sera plus temps de le voir.

Il y a deux ans que je les préviens que ce qui caractérise la liberté limitée, c'est d'être l'arbitraire illimité.

Heureusement que je n'ai pas seul le don de prophétie, et que ce don n'appartient pas à un moindre degré à M. L.-N. Bonaparte.

Lisez l'épigraphe, car désormais ce qu'il ne sera plus permis d'écrire, on le mettra en épigraphes inviolables.

Voilà où en est, le 15 septembre 1851, en France, la liberté de la presse, sous une Assemblée issue du suffrage universe!!

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